Steven Reid, Ph. D. et Mary Reid, Ph. D.
Pour avoir une idée de l’état actuel des mathématiques dans les salles de classe de l’Ontario, il suffit de s’adresser au parent moyen. Il vous dira, par exemple : « Les mathématiques ont bien changé! », « Je ne comprends pas ces nouvelles mathématiques » ou « Je ne sais vraiment pas comment aider mon enfant à réussir en mathématiques ». Les commentaires de ce genre sont encore plus fréquents chez les parents d’enfants ayant des troubles d’apprentissage (TA), et vous entendrez inévitablement des anecdotes d’expériences personnelles en mathématiques. Un large fossé semble séparer les personnes qui croient avoir la « bosse des maths » et celles qui disent ouvertement ne « rien comprendre aux mathématiques », ce qui peut, en soi, poser un défi lorsqu’on évalue comment aider tous les élèves, même ceux qui ont des TA, à se voir comme des mathématiciennes et des mathématiciens. Chaque personne possède une identité mathématique, une façon individuelle de concevoir ses propres aptitudes en mathématiques (Reid, 2019). Cette identité se construit socialement et est communiquée dans le monde où l’on évolue chaque jour (Azmitia, Sye et Radmacher, 2008). Un large éventail de variables influence l’identité mathématique, y compris les connaissances en mathématiques, le niveau d’assurance, ainsi que diverses identités croisées associées au genre, à la race et au statut socioéconomique (Reid, 2019).
L’enfant qui commence sa scolarisation connaît déjà plusieurs notions mathématiques pour les avoir observées dans son environnement quotidien (Clarke, Cheeseman et Clarke, 2006). Une anxiété liée aux mathématiques peut toutefois se manifester dès l’âge de cinq ans, et même avant. À 10 ans, les élèves sont capables de décrire leur rapport aux mathématiques, l’origine de leur anxiété face aux mathématiques ainsi que les symptômes associés. Soulignons aussi que, contrairement à l’anxiété générale, l’anxiété liée aux mathématiques tend à augmenter avec l’âge (Carey et coll., 2019). Le personnel enseignant et les parents doivent donc apprendre à reconnaître et à atténuer l’anxiété des mathématiques, ainsi qu’à favoriser le bien-être et à renforcer la résilience en mathématiques. Ces objectifs doivent faire partie d’une approche d’équipe-école afin de développer des communautés dynamiques d’apprenantes et d’apprenants de mathématiques dans les salles de classe et en dehors de l’école.
Reconnaissance de l’anxiété liée aux mathématiques
Beaucoup de chercheurs s’intéressent à la façon dont l’anxiété liée aux mathématiques influence les expériences mathématiques et vice versa. Même si la recherche doit se poursuivre dans les deux domaines, de solides données probantes indiquent que l’anxiété liée aux mathématiques empêche la mémoire de travail de fonctionner efficacement en mathématiques (Dowker, Sarkar et Looi, 2016). Comme les troubles d’apprentissage sont parfois associés à des déficits de la mémoire de travail, les élèves ayant un tel trouble concomitant vont plus souvent vivre de l’anxiété face aux mathématiques et avoir des difficultés dans cette matière. On aurait tort de négliger cette forme d’anxiété étant donné que les élèves, le personnel enseignant et les parents peuvent en expérimenter les symptômes. En effet, comme toute autre forme d’anxiété, l’anxiété des mathématiques peut causer des symptômes physiques (p. ex., agitation, inquiétude excessive, transpiration) et comportementaux (p. ex., évitement, anxiété de performance, négativité) [Plaisance, 2009]. L’échelle utilisée pour mesurer l’anxiété liée aux mathématiques s’étend d’un niveau faible à élevé. Sans intervention, l’anxiété liée aux mathématiques peut augmenter avec le temps, au point où les élèves ont de la difficulté à se croire capables de réussir en mathématiques. Il est donc important de savoir reconnaître les signes d’anxiété à l’école ou à la maison, des symptômes pouvant se manifester lorsqu’on demande aux élèves de réaliser des tâches mathématiques ou lorsque les élèves pensent à de futures expériences mathématiques, comme un examen à venir.
Agitation
- L’agitation est l’un des symptômes observés le plus souvent chez les enfants et les jeunes qui vivent de l’anxiété (Ginsburg, Riddle et Davies, 2006).
- Si des élèves sont agités durant les activités mathématiques, il faut chercher à identifier les comportements : ont-ils de la difficulté à se mettre au travail? Bavardent-ils avec des camarades? Est-ce qu’ils s’agitent sur leur chaise?
Inquiétude excessive
- Un changement d’expression peut être visible chez les élèves lorsqu’une activité mathématique est mentionnée ou proposée.
- L’élève qui vit une inquiétude constante face aux devoirs peut avoir de la difficulté à se concentrer.
Transpiration
- La transpiration peut augmenter lorsque les élèves se sentent nerveux ou anxieux. L’organisme peut avoir une réaction de lutte ou de fuite, ce qui accélère la respiration et le rythme cardiaque et entraîne la production de sueur.
- L’observation de signes physiques de transpiration peut accroître la production de sueur, créant ainsi un cycle indésirable.
Évitement
- Les élèves qui ont une attitude négative trouveront probablement des excuses pour éviter les activités mathématiques (p. ex., pauses toilettes, maladie, oubli du matériel dans le casier ou à la maison).
- Le souvenir d’expériences mathématiques négatives peut susciter une résistance à persévérer.
Anxiété de performance
- Les épreuves chronométrées peuvent causer un stress supplémentaire puisque l’accent mis sur le temps restant accapare la charge cognitive, ce qui diminue la disponibilité de la mémoire de travail pour résoudre un problème ou terminer une tâche.
- La peur de l’échec peut perturber le niveau de concentration, entretenant ainsi une vision négative des habiletés mathématiques.
Négativité
- L’élève qui vit de l’anxiété peut en venir à avoir une faible image de soi.
- Un discours intérieur négatif, qui est associé à un faible rendement, découle souvent d’une perception d’habiletés et de capacités insuffisantes en mathématiques. En comparaison, un discours intérieur positif est associé à un meilleur rendement en mathématiques (Thomaes, Tjaarda, Brummelman et Sedikides, 2019)
Stratégies pour favoriser le bien-être et réduire l’anxiété liée aux mathématiques
Lorsque l’anxiété des mathématiques est décelée rapidement, des stratégies peuvent être mises en place pour favoriser le bien-être des élèves en modifiant leur rapport aux mathématiques et leur idée de ce que signifie être une mathématicienne ou un mathématicien. Il est important que l’enseignante ou l’enseignant tienne compte de son propre niveau d’anxiété, de son aisance à enseigner les mathématiques et de ses croyances personnelles face à l’apprentissage des mathématiques. Les défis mathématiques devraient susciter de l’excitation chez les élèves et l’envie de s’attaquer à des problèmes complexes. Ensemble, le personnel enseignant et les élèves peuvent créer un environnement de collaboration et d’entraide où toutes et tous se reconnaissent des habiletés mathématiques. Diverses stratégies peuvent donc être mises en place pour favoriser le bien-être, atténuer l’anxiété et susciter un réel intérêt pour les mathématiques.
Réduction de la charge mentale
- Les élèves ayant des TA, en particulier ceux qui ont des troubles liés à la mémoire ou aux fonctions exécutives, peuvent avoir de la difficulté à retenir l’information requise pour résoudre un problème. Conseil : la ressource Understanding Learning Disabilities: How Processing Affects Mathematics Learning (disponible en anglais seulement) aide le personnel enseignant à planifier des activités d’apprentissage et d’évaluation en mathématiques.
- Il est possible de réduire la charge mentale en décomposant l’information et les questions en unités ou étapes plus petites au moyen d’aides visuelles (p. ex., organisateurs graphiques, infographies, diagrammes, listes de vérification et calendriers).
- Les élèves doivent avoir facilement accès à des soutiens personnalisés durant les activités mathématiques (p. ex., référentiels personnalisés, dictionnaires mathématiques, aide-mémoire et listes de formules, de procédures et de terminologie).
- Beaucoup d’élèves ayant des TA tirent profit des technologies d’aide. Pour ceux qui ont un déficit de la mémoire de travail, les technologies d’aide donnent accès à des soutiens généraux et personnalisés (p. ex., logiciels mathématiques, calculatrices, calculatrices graphiques, logiciels de conversion parole-texte et texte-parole, organisateurs graphiques).
Respiration consciente
- Des études indiquent qu’une pratique régulière de la respiration consciente aide à apaiser les élèves qui vivent une forte anxiété liée aux mathématiques (Brunyé et coll., 2013).
- Encouragez les élèves à diriger leur attention sur leur respiration avant de commencer une activité mathématique. Conseil : dites aux élèves d’inspirer profondément par le nez en comptant jusqu’à quatre, en sentant leur ventre se gonfler. Ils doivent retenir leur respiration pendant quelques secondes (de trois à cinq), puis expirer lentement. Assurez-vous que les élèves restent concentrés sur leur respiration.
Mettre l’accent sur le processus plutôt que sur la rapidité et les bonnes réponses
- Les élèves doivent comprendre l’importance de réfléchir en profondeur à une question ou à un problème, et il faut leur laisser beaucoup de temps. Lorsqu’on donne aux élèves le temps de réfléchir en profondeur aux questions, on constate une amélioration de la qualité de leurs réponses et de leur attitude envers l’apprentissage des mathématiques (White et Tisher, 1986).
- Les élèves doivent reconnaître que les mathématiciennes et mathématiciens prennent le temps de réfléchir au problème soumis, de déterminer les stratégies qui peuvent être utilisées, d’appliquer les stratégies choisies et de faire une réflexion afin de déterminer si la solution est raisonnable.
Explorer plusieurs stratégies de résolution de problèmes
- Les élèves peuvent créer leurs propres stratégies (Mascardini, 2010) ainsi qu’explorer diverses stratégies pour résoudre des problèmes mathématiques (Kroesbergen et van Luit, 2002).
- Il est important que les élèves aient du temps en classe pour réfléchir à leurs propres stratégies et à celles utilisées par leurs camarades, tout en justifiant quelle approche pourrait être plus appropriée ou efficace.
Encourager un effort productif
- Les élèves apprennent mieux lorsque l’enseignante ou l’enseignant les aide à faire un effort productif et à persévérer à la résolution d’un problème même si la solution ne leur semble pas évidente.
- On peut encourager un effort productif en donnant aux élèves le temps de résoudre des problèmes difficiles pour lesquels ils auront à expliquer et à justifier leur raisonnement (Warshauer, 2015).
Poser des questions ouvertes
- Les questions ouvertes permettent aux élèves d’expérimenter différentes stratégies en faisant appel aux connaissances mathématiques acquises antérieurement.
- Lorsque les élèves choisissent différentes façons de résoudre des questions ouvertes, ils peuvent décrire les stratégies qu’ils ont utilisées et voir les stratégies de résolution de problèmes utilisées par leurs camarades.
Créer une communauté d’apprenantes et d’apprenants de mathématiques
« La recherche démontre hors de tout doute l’importance d’une mentalité de croissance, soit la croyance que l’intelligence se développe et que, plus on apprend, plus on défriche de nouveaux chemins mathématiques. Mais pour éliminer l’échec en mathématiques, les élèves doivent croire en leur capacité de croissance et intégrer des croyances positives à l’égard des mathématiques, de manière à améliorer leur rapport avec cette matière. Les enfants doivent voir les mathématiques comme une matière conceptuelle croissante qui sollicite leurs habiletés de réflexion et de compréhension. » (Boaler, 2019, p. 29) [traduction libre] »
Les enseignantes et enseignants forment un maillon essentiel du processus d’apprentissage de tous les élèves. On pourrait même dire qu’ils jouent un rôle crucial dans la classe de mathématiques dans le sens où leurs propres valeurs et croyances peuvent nourrir une attitude positive (Wilkins et Ma, 2003) ou transférer des sentiments d’anxiété (Beilock et coll., 2010) face aux mathématiques. Puisque les élèves ayant des TA peuvent vivre une anxiété accrue (Al-Yagon et Mikulincer, 2004; Wilson, Armstrong, Furrie et Walcot, 2009), le personnel enseignant doit être à l’affût et surveiller les signes qui traduisent une anxiété générale et liée aux mathématiques dans la salle de classe. Dans le cadre des activités de perfectionnement continu en enseignement des mathématiques, on encourage le personnel enseignant à adopter une approche d’apprentissage collaboratif. Des règles de participation particulières doivent être proposées dans chaque salle de classe afin de favoriser la création d’une communauté d’apprenantes et d’apprenants de mathématiques :
Mentalité de croissance – promouvoir un environnement sécuritaire d’apprentissage par la collaboration
- Il est important de rappeler souvent aux élèves que tout le monde peut devenir mathématicienne ou mathématicien avec du soutien et des efforts assidus.
- Une attitude positive à l’égard des mathématiques est associée à un meilleur rendement scolaire.
- Il est important que les élèves voient les erreurs en mathématiques comme un moyen d’apprendre, autant de manière individuelle qu’en groupe.
- Les erreurs ne sont pas considérées comme un signe de faiblesse en mathématiques; en revanche, la réaction aux erreurs peut mener à un apprentissage plus en profondeur des notions mathématiques.
- Conseil : il est essentiel que le personnel enseignant ait une mentalité de croissance dans la classe de mathématiques. Pour les élèves qui ont des TA, et ceux qui ne se voient pas encore comme des mathématiciennes et mathématiciens, l’attitude positive du personnel enseignant à l’égard de l’apprentissage peut faire la différence entre l’engagement et le retrait. L’apprentissage professionnel continu et la collaboration entre collègues enseignants peuvent nourrir une attitude positive face à l’apprentissage des mathématiques, tant chez les élèves que chez le personnel enseignant.
Respecter le style d’apprentissage et le point de départ de chacun
- Il faut empêcher les élèves de claironner la fin d’une tâche en disant par exemple « Wow, c’était vraiment facile! » Ce genre d’interventions peut instantanément décourager les autres en leur faisant sentir qu’ils sont trop lents et incapables de faire des mathématiques. Les élèves doivent comprendre que la rapidité n'est pas un gage de réussite en mathématiques.
- Beaucoup d’élèves ont la croyance que les mathématiciens solutionnent rapidement les problèmes. Toutefois, la résolution de problèmes intéressants et complexes prend beaucoup de temps. L’octroi d’un délai supplémentaire est souvent une adaptation offerte aux élèves qui ont des TA. Les élèves ne doivent pas se sentir pressés par le temps durant les activités mathématiques. Conseil : lorsque vous proposez des questions complexes et longues à résoudre, prévenez les élèves qu’ils devront fournir un effort et que cette difficulté fait partie de l’apprentissage. Cette consigne explicite peut atténuer l’anxiété chez les élèves qui ont besoin de temps supplémentaire pour résoudre le problème.
Croire en une intention positive
- Les élèves doivent croire que leurs camarades sont animés d’une intention positive lorsqu’ils s’engagent dans un débat mathématique. Avec la pratique, l’échange d’idées devient un processus qui aide les élèves à créer collectivement de nouvelles connaissances, au lieu qu’un seul élève ait la bonne réponse. La participation orale à des processus mathématiques (p. ex., communiquer, réfléchir, raisonner et démontrer) peut être une force pour certains élèves ayant des TA. D’autres peuvent aussi tirer profit d’un échange d’idées au moyen de technologies d’aide variées.
- Les cours de mathématiques doivent permettre aux élèves d’échanger des idées au sujet de notions et de méthodes de résolution de problèmes. Les élèves doivent comprendre que les différences d’idées et les débats constituent des éléments importants pour approfondir les connaissances mathématiques.
Rendre les mathématiques dynamiques
- L’automatisation des faits exige une pratique authentique durant laquelle les élèves interprètent activement le sens des nombres.
- Les feuilles d’exercice ne constituent pas le seul moyen d’accroître la fluidité des processus. Conseil : évitez de donner des exercices chronométrés étant donné qu’ils peuvent générer de l’anxiété à l’égard des mathématiques (Boaler, 2014).
- Les jeux mathématiques amusants qui comportent un élément de choix permettent aux élèves de pratiquer leurs habiletés mathématiques d’une manière dynamique. Les élèves qui ont des TA apprécient particulièrement les questions à choix multiples puisqu’elles leur offrent plusieurs points d’entrée et pistes de solution. Conseil : vous trouverez un éventail de jeux et de tâches stimulantes sur le site Web : youcubed.org, une ressource mathématique en ligne créée par la Stanford University’s Graduate School (disponible en anglais seulement).
Écoute active sans jugement
- Il faut rappeler aux élèves que, dans le cadre de l’écoute active, ils doivent réfléchir aux réponses de leurs camarades sans poser de jugement. En groupe, les élèves échangent des idées pour arriver à une compréhension commune et la célébrer. L’enseignante ou l’enseignant peut identifier les adaptations particulières qui aideront les élèves ayant des TA à communiquer leur réflexion. Les élèves qui ont une compréhension plus poussée peuvent utiliser des médias d’expression variés qui leur permettront de contribuer aux échanges futurs.
- Il faut encourager les élèves à écouter les autres afin de pouvoir poser des questions au sujet de certains détails, résumer ce qu’ils entendent, demander des précisions ou donner une rétroaction positive. Conseil : on peut guider les élèves en utilisant des fiches aide-mémoire qui encouragent l’écoute active, p. ex. « Pourquoi as-tu choisi cette stratégie pour résoudre le problème? », « Quelle partie du problème as-tu trouvé la plus difficile? »
Approches dynamiques pour l’enseignement des mathématiques
Chaque classe de mathématiques devrait mettre l’accent sur la promotion d’environnements d’enseignement et d’apprentissage dynamiques. Suivant cette approche, les élèves doivent évoluer dans des environnements qui leur permettent d’apprendre les uns des autres et d’acquérir une compréhension en profondeur des notions mathématiques au moyen de tâches mathématiques complexes et authentiques (Reid, 2019). Cela ne veut pas dire que les élèves découvrent des notions mathématiques sans le soutien de l’enseignante ou de l’enseignant. Au contraire, l’enseignante ou l’enseignant joue un rôle central et essentiel en créant différentes tâches d’apprentissage, en différenciant les niveaux de soutien offerts durant les activités et tout au long de la planification à long terme, p. ex., plans hebdomadaires, plans de leçon. Dans le cadre d’un programme dynamique, l’enseignante ou l’enseignant crée des leçons qui font appel aux habiletés d’enquête, de résolution de problèmes et de compréhension conceptuelle. Les élèves développent progressivement leur résilience en mathématiques en participant activement à des tâches qui sont stimulantes et complexes, et en collaborant avec d’autres pour échanger des idées et partager des stratégies possibles (Lee et Johnston-Wilder, 2015). Les élèves développent aussi une aisance procédurale, soit la capacité d’utiliser leurs connaissances mathématiques dans de nouvelles situations (National Council of Teachers of Mathematics, 2014). Soulignons qu’un programme dynamique met en outre l’accent sur l’utilisation de procédures et d’algorithmes qui appuient l’automatisation des faits mathématiques. Globalement, les enseignantes et les enseignants encouragent la compréhension conceptuelle de chacun de ces objectifs au sein du programme (Reid, 2019).
À la lumière de l’approche dynamique envisagée pour l’enseignement et l’apprentissage des mathématiques, des questions se posent en ce qui concerne les élèves qui ont des TA. Par exemple, les élèves ayant des TA peuvent-ils tirer profit de cette approche si elle exige des habiletés poussées d’enquête et de compréhension conceptuelle? Une analyse de la recherche menée dans le domaine des mathématiques révèle souvent un écart entre les approches pédagogiques privilégiées pour les élèves qui ont, ou non, des besoins particuliers, y compris ceux qui ont des TA. Un mythe qui ressort de la recherche veut que les élèves ayant des TA ne tirent pas profit de l’enquête durant les activités mathématiques (Lambert, 2018). Il importe de préciser que les adaptations ne doivent pas priver l’élève d’un apprentissage par l’enquête. C’est l’excitation de participer à des activités d’enquête authentiques qui donnent aux élèves qui ont des TA la possibilité de faire un lien entre les notions mathématiques et le monde réel (Bottge, 2015). Bien qu’un enseignement explicite puisse être utile pour les élèves qui ont des TA, la recherche n’a pas démontré qu’ils apprennent les mathématiques uniquement de cette façon (Gersten et coll., 2009). En fait, ils tirent également profit, par exemple, d’activités d’enquête qui font un lien entre les mathématiques et le monde réel (Bottge, 2015), en construisant leurs propres stratégies durant la résolution de problèmes (Moscardini, 2010) et en mettant en pratique les stratégies efficaces qu’ils ont créées (Kroesbergen et van Luit, 2002). De façon générale, les stratégies produites par les élèves incitent ces derniers à approfondir leur compréhension conceptuelle pour solidifier leurs connaissances mathématiques.
Conclusion
Tous les élèves peuvent développer leurs habiletés comme mathématiciennes et mathématiciens au sein d’une communauté apprenante positive. Les élèves qui évoluent dans des environnements d’enseignement et d’apprentissage dynamiques profitent d’un échange collaboratif d’idées, de stratégies, de réflexions et de justifications. Il importe surtout que le personnel enseignant soit à l’affût de tout signe d’anxiété liée aux mathématiques, de façon à mettre rapidement en place des stratégies qui aideront à diminuer l’anxiété et favoriseront le bien-être des élèves. Les élèves, en particulier ceux qui ont des TA, doivent bénéficier d’environnements de classe qui célèbrent l’apprentissage des mathématiques, reconnaissent les points forts et les besoins particuliers de chaque élève et valorisent le contexte social de l’apprentissage des mathématiques.
À propos des auteurs :
Steven Reid, Ph. D. – directeur associé de l’éducation, York Region DSB; chargé de cours à temps partiel, Institut d’études pédagogiques de l’Ontario.
Inlassable défenseur des intérêts des élèves, Steven Reid a exercé diverses fonctions au sein du système d’éducation, notamment comme enseignant chargé de cours, directeur d’école et agent de supervision. En sa capacité actuelle de directeur associé de l’éducation, il se consacre à la réussite scolaire et au bien-être des élèves peu performants provenant de milieux défavorisés. Steven a commencé sa carrière comme aide-enseignant auprès d’élèves ayant des besoins particuliers et a bouclé son parcours en devenant surintendant de l’éducation de l’enfance en difficulté. Il a également occupé diverses fonctions au ministère de l’Éducation, notamment à titre de spécialiste principal et de directeur, et il a été directeur principal de l’évaluation à l’Office de la qualité et de la responsabilité en éducation (OQRE). Steven est également chargé de cours à temps partiel à l’Institut d’études pédagogiques de l’Ontario, ayant à cœur d’augmenter la confiance des étudiantes et étudiants de cycle supérieur en apprentissage et en enseignement des mathématiques. Les travaux de recherche et publications de Steven ont porté sur les connaissances mathématiques et l’anxiété liée aux mathématiques chez les candidates et candidats à l’enseignement, ainsi que sur la mobilisation des connaissances dans les écoles et conseils scolaires de district.
Mary Reid, Ph. D. – professeure adjointe, Institut d’études pédagogiques de l’Ontario.
Mary Reid est professeure adjointe en enseignement des mathématiques au département du curriculum, de l’enseignement et de l’apprentissage de l’Institut d’études pédagogiques de l’Ontario. Au cours de sa carrière, Mary a occupé les postes d’enseignante chargée de cours, de leader pédagogique, d’agente d’éducation à l’Office de la qualité et de la responsabilité en éducation (OQRE), de directrice adjointe et de directrice d’école. À l’Institut, Mary enseigne différents cours de mathématiques, dont Curriculum and Teaching in Mathematics et Issues in Numeracy, à des candidates et candidats à la maîtrise en enseignement au palier élémentaire. Elle a signé des articles traitant des connaissances mathématiques des futurs enseignants et enseignantes au palier élémentaire, de l’anxiété liée aux mathématiques dans la salle de classe, de l’écart entre les sexes dans les STIM et de l’amélioration de l’efficacité dans l’enseignement des mathématiques. Par ses travaux de recherche, elle veut mettre au jour les défis complexes que vivent les candidates et candidats à l’enseignement au palier élémentaire pendant leur préparation à l’enseignement des mathématiques. Les travaux de Mary s’adressent aux personnes qui souhaitent améliorer l’enseignement des mathématiques par le renforcement des capacités du personnel enseignant.
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