Enseigner à l’élève à  défendre ses propres intérêts

Mon parcours relativement à la défense par l’élève de ses intérêts a commencé sur un terrain précaire; il s’agissait d’un nouveau concept pour moi et d’une des principales pièces manquantes pour les élèves. Durant toutes mes années d’enseignement, j’ai vu mes élèves se vexer lorsqu’une enseignante ou un enseignant leur demandait quelque chose qui leur paraissait impossible.

Je me suis rendu compte que trop souvent, j’avais des conversations difficiles avec le corps enseignant au sujet des besoins de mes élèves alors que j’aurais dû laisser mes élèves s’exprimer et communiquer eux-mêmes leurs besoins.

- Julia Osborne. Enseignante-ressource en éducation de l’enfance en difficulté, York Region DSB

Pour encourager les élèves à défendre leurs propres intérêts, il faut les aider à acquérir une conscience de soi et de l’estime de soi, à se sentir efficaces et maîtres de leur vie, à promouvoir leurs droits et à plaidoyer en faveur de leurs propres droits, à se fixer des objectifs et à chercher à les atteindre, à faire des choix et à prendre des décisions, à résoudre des problèmes et à faire de l’introspection ainsi qu’à s’engager dans un dialogue intérieur[1]. Ce n’est que lorsqu’ils se connaissent eux-mêmes, qu’ils connaissent leur style d’apprentissage, leurs points forts et leurs points faibles que les élèves sont en mesure de défendre leurs propres intérêts et de réussir.

Comprendre pourquoi les élèves ne défendent pas leurs propres intérêts

Deux conditions sont essentielles à la défense de ses propres intérêts : le sentiment d’être capable de réussir et un sentiment de sécurité émotionnelle. Ordinairement, les élèves ayant des TA éprouvent des difficultés ou ont besoin d’aide plus souvent que leurs pairs, et leur sentiment de compétence et de sécurité émotionnelle risque davantage d’être compromis. À l’école, ils bûchent parfois très fort, mais leurs résultats ne reflètent pas toujours les efforts investis. Ils n’ont pas nécessairement le sentiment de maîtriser leur apprentissage. Ces élèves sont moins enclins à s’investir dans une tâche, surtout s’ils n’ont pas le sentiment d’être capables de défendre leurs propres intérêts[2]. Au fil du temps, ils risquent d’être moins persévérants et d’avoir recours à des stratégies d’adaptation comme l’évitement et le désespoir.

Les facteurs de stress liés au cheminement scolaire peuvent aussi diminuer leur sentiment de maîtrise et réduire les occasions de se sentir compétents dans un domaine ou de réussir. Les élèves ayant des TA sentent peut-être qu’ils ne répondent pas aux attentes des autres ou à leurs propres attentes, qu’ils déçoivent leurs parents ou leurs parents-substituts et leurs enseignantes et enseignants, ou qu’ils ne travaillent pas assez fort, alors qu’en réalité, ils investissent beaucoup d’efforts dans leurs études. Cela peut susciter chez eux des sentiments négatifs comme de l’inquiétude, de la colère, de la frustration et de la tristesse. Par ailleurs, une étude menée par Bergeron[3] a démontré que si les élèves craignent les réactions de leurs pairs lorsqu’ils demandent de l’aide ou qu’ils ont peur de commettre des erreurs devant des professionnels de l’enseignement, ils hésiteront à se rendre vulnérables ou à prendre le genre de risques et d’initiatives que requiert la défense de leurs propres intérêts. Lorsque les élèves ne se sentent pas assez sûrs d’eux-mêmes pour demander des adaptations ou qu’ils sentent qu’ils échoueront malgré l’aide supplémentaire qu’ils reçoivent, ils ne défendront pas leurs intérêts.[1] Wehmeyer et Field, 2007, Wehmeyer, Agran et Hughes, 1998

[2] Wehmeyer, Agran et Hughes, 1998

[3] Bergeron, 2013