Corrélation entre la lecture et l’écriture
Selon les recherches, la lecture et l’écriture se développent en même temps et ce, de façon parallèle et interdépendante. Il est donc important que le processus de lecture soit enseigné en même temps que le processus d’écriture [1].
Des études établissent l’existence d’une corrélation importante entre la lecture et l’écriture, tant chez les élèves qui satisfont aux attentes de leur niveau d’études que chez ceux qui ont des difficultés en lecture [2]. L’enseignement de la lecture doit donc inclure également une composante d’apprentissage de l’écriture.
Les habiletés de traitement du langage sont communes aux deux processus complexes que sont la lecture et l’écriture [3]. On considère souvent l’écriture comme une façon de renforcer la compréhension et d’amener le lecteur à réfléchir plus en profondeur à ce qu’il vient de lire, et cette approche est en effet très bénéfique. La recherche montre aussi que le fait d’écrire au sujet d’un texte favorise la mémorisation et la récupération [4], qu’il s’agisse de redire l’histoire dans ses propres mots ou d’écrire à propos des éléments importants du texte. Cette stratégie est particulièrement profitable pour les élèves ayant des TA qui ont souvent une capacité de mémorisation et de récupération plus faible.
L’écriture est néanmoins tout aussi importante pour les lecteurs émergents et débutants puisqu’elle renforce des aspects syntaxiques du langage, notamment la façon dont les phrases sont organisées et la façon dont une histoire évolue d’une manière prévisible.
Cette section du module traitera de l’importance de l’écriture aux différents stades de l’acquisition de la lecture.
Lecteurs émergents et débutants
Chez les lecteurs émergents et débutants, l’écriture joue un rôle dans le renforcement de la conscience de l’écrit et des correspondances graphème-phonème. L’écriture manuscrite des élèves à ce stade peut aussi servir de signe précurseur de difficultés en lecture.
Développer la connaissance syntaxique
L’enseignement de la lecture aux lecteurs émergents vise à développer la conscience de l’écrit et les premières habiletés de lecture. À cette stade, les élèves devraient commencer à composer leurs propres histoires. On commence toujours par demander à l’élève de faire un dessin puis d’en parler au professionnel de l’enseignement, qui écrit exactement ce que l’élève a dit en dessous du dessin. Même si l’élève ne peut pas encore lire ce qui est écrit, cette pratique renforce plusieurs aspects importants de la conscience de l’écrit, et lui permet de se sentir déjà capable de composer un texte significatif.
Chez le lecteur émergent, la graphie des mots comprend le premier son du mot et souvent, un deuxième son dominant. Habituellement, l’élève regroupe toutes les lettres ensemble sans laisser d’espace entre les mots. À cette étape, le professionnel de l’enseignement commence à enseigner le concept de mot et d’espacement des mots (p.ex., « Place un doigt entre chaque mot lorsque tu écris. »).
En écrivant, l’élève assimile des concepts syntaxiques du langage écrit :
- le sens de la lecture (de gauche à droite en français);
- l’espacement des mots;
- la ponctuation à la fin des phrases;
- l’utilisation d’une lettre majuscule au début d’une phrase.
L’équipe pédagogique peut renforcer ces concepts syntaxiques en demandant aux élèves d’encercler tous les points qu’ils peuvent trouver dans le texte, ou toutes les lettres majuscules.
À mesure que les élèves maîtrisent l’écriture des lettres, ils devraient aussi apprendre à écrire les mots les plus significatifs de leur vie courante : leur prénom et celui des membres de leur famille. Les élèves vont souvent les écrire sous forme de liste verticale. En fait, le professionnel de l’enseignement peut même encourager cette pratique en plaçant des crayons et des petits blocs-notes dans différents centres d’apprentissage et en demandant aux élèves d’écrire des listes de choses qu’ils associent aux centres, comme une liste d’épicerie. Au début, cela ressemblera à un gribouillage, mais ce gribouillage aura un sens si l’élève dit le mot pendant qu’il l’écrit. L’action d’écrire, même dans sa forme la plus élémentaire comme le gribouillage, renforce l’idée essentielle que le texte a un sens. Il s’agit d’une étape importante dans l’apprentissage des élèves ayant des TA, pour qui la lecture est si laborieuse qu’il va souvent chercher à se débarrasser de la tâche sans réfléchir au sens des mots qu’il lit.
Premiers signes de difficultés possibles en lecture
Tous les enfants ont besoin d’apprendre à écrire. La maîtrise kinesthésique de l’écriture des lettres constitue un aspect très important de l’apprentissage du lien son-symbole, surtout chez les élèves ayant des TA. Il est important que les élèves apprennent à bien écrire les lettres en maternelle/jardin et en première année, non seulement pour la calligraphie, mais aussi pour la reconnaissance des lettres en lecture.
La tendance des jeunes enfants à inverser les lettres fait partie du développement normal, et il est très important que le professionnel de l’enseignement renforce l’écriture précise des lettres. Une difficulté persistente à bien écrire les lettres peut indiquer un TA en écriture, et possiblement aussi un TA en lecture. Si un élève a une difficulté persistante alors que la majorité des élèves de la classe maîtrisent l’écriture des lettres, il y a lieu de lui offrir une intervention de 2e palier, ou éventuellement de recommander une évaluation.
Diverses stratégies se sont révélées utiles pour aider les élèves qui ont de la difficulté à bien écrire les lettres, notamment les suivantes :
- s’exercer à écrire des lettres individuelles chaque jour;
- demander aux élèves de fermer les yeux et de tracer les lettres individuelles dans les airs avec leur index;
- demander à l’élève d’utiliser un crayon pour tracer par-dessus les lettres individuelles (et plus tard des mots) qui ont été écrites par le professionnel de l’enseignement ou par une autre personne de la classe;
- demander à l’élève d’écrire les lettres individuelles (et plus tard des mots) sur la ligne au-dessus des lettres ou des mots qui ont été écrits par le professionnel de l’enseignement ou par une autre personne de la classe.
Lecteurs en transition et lecteurs habiles
Des études indiquent que la structure du texte – ou le syntaxe – pourrait être l’un des aspects les plus importants pour renforcer le lien entre la lecture et l’écriture. Nous savons que, en deuxième année, la connaissance des indices syntaxiques est un bon indicateur de la capacité à lire [5]. Ceci inclut la façon dont les textes sont structurés, ainsi que la façon dont les phrases sont structurées.
Le lecteur efficace se distingue du lecteur en difficulté par sa capacité à percevoir spontanément la structure du texte [6], ce qui lui permet d’anticiper le type d’information qu’il lira à différents endroits dans une phrase et dans un texte plus long. Cette habileté favorise la fluidité en lecture – la vitesse de lecture – laquelle est étroitement liée à la capacité de compréhension.
Lorsqu’on enseigne explicitement comment structurer une phrase et un texte et que l’on renforce continuellement ces structures, les élèves arrivent à comprendre où placer le sujet ou l’idée principale d’une phrase lorsqu’ils écrivent. Les phrases supplémentaires servent alors à élaborer le sujet ou l’idée principale.
Par la suite, lorsqu’ils lisent un texte, les élèves savent intuitivement où se trouve l’idée principale et comprennent que les autres éléments contenus dans le paragraphe servent à « préciser » ou à élaborer cette idée. Cette stratégie est extrêmement utile pour beaucoup d’élèves qui ont des TA et qui ont de la difficulté à distinguer l’idée principale des détails.
Le processus d’écriture
En première année, les élèves écrivent habituellement des histoires et des lettres. Ce format doit guider la composition. Par exemple, pour la rédaction d’une histoire, le professionnel de l’enseignement insistera sur les six éléments clés (qui, quoi, quand, où, pourquoi et comment). Un aide-mémoire contenant ces éléments sera affiché au tableau.
Des études montrent que les élèves qui utilisent régulièrement les mêmes structures de texte dans leurs tâches de rédaction ont plus de facilité à reconnaitre ces éléments dans les textes qu’ils lisent et que leur capacité de compréhension s’améliore en conséquence.
Références
[1] Thériault, 1996
[2] Chan et coll., 2006; Loban, 1976; Resnick, 1984
[3] Stotsky, 1995
[4] Stotsky, 1984
[5] Vellutino et coll., 1991
[6] Stotsky, 1995