Reconnaissance globale (Adressage)
Cette procédure est la voie visuelle de reconnaissance de mots. Pour les élèves ayant des TA liés à la conscience et au traitement phonologique, l’enseignement du décodage par des approches uniquement phonologiques risque de ne pas rejoindre leurs besoins. Donc, l'enseignement de la reconnaissance globale s'avère une stratégie gagnante.
Étude de mots
L’étude de mots donne l’occasion aux élèves d’examiner et de comprendre les patrons orthographiques dans les mots. Cette activité permet aux élèves de reconnaître globalement les mots courants, ce qui permet de les lire de façon spontanée et d’utiliser des stratégies pour lire des mots inconnus [1].
L’étude de mots est fondée sur des mots fréquents, que les élèves peuvent apprendre à reconnaître globalement et lire de façon spontanée, ainsi que sur des stratégies d’identification de mots, que les élèves peuvent employer pour lire des mots inconnus ou nouveaux.
Le professionnel de l’enseignement pourrait demander aux élèves de :
- faire l’analyse comparative des caractéristiques de mots;
- classer des mots sur des cartes de mémoire;
- chercher des patrons de mots dans un texte;
- faire des activités en utilisant un mur de mots;
- créer un cahier d’étude de mots;
- jouer des jeux d’étude de mots.
Lecture partagée
Certains aspects de la lecture, tels que les correspondances graphème-phonème et l’étude de mots, peuvent être enseignés hors contexte. Pourtant, il faut ensuite intégrer de telles activités dans des situations d’apprentissage authentiques, en utilisant des textes susceptibles d’intéresser les élèves [2]. La lecture partagée s’avère une excellente stratégie pédagogique qui permet aux élèves de pratiquer leurs habiletés de décodage, de reconnaitre les mots fréquents et de se considérer comme des lecteurs.
Cliquer ici afin d’accéder au document Comment réaliser une activité de lecture partagée.
Lecture fluide de mots fréquents
Une étude régulière de mots fréquents favorise la reconnaissance globale et spontanée de mots, ce qui contribue à une amélioration de la fluidité en lecture. La salle de classe doit être un milieu riche en écrits afin de donner aux élèves maintes occasions de se familiariser avec les mots fréquents et les patrons orthographiques.
Le mur de mots s’avère un excellent outil pour exposer les élèves aux mots fréquents ou aux « familles » de mots (comme les mots finissant en « eur »). En offrant un soutien visuel, il allège la mémoire de travail, offre des repères et expose l’élève à la bonne orthographe ou au vocabulaire spécialisé. De plus, certaines activités liées au mur de mots offrent un modèle d’organisation des connaissances, ce qui peut favoriser la rétention chez l’élève ayant des TA. Cliquer ici afin d’accéder à l’article Le mur de mots : du primaire à l’intermédiaire.
Par contre :
Des difficultés pourraient provenir soit de difficultés générales à mémoriser les informations visuelles soit de difficultés spécifiques à analyser simultanément l’ensemble des lettres des mots. Un problème particulier se pose pour les « petits » mots grammaticaux dont la graphie ne correspond pas de manière simple à la forme sonore. Or, ces mots sont très fréquents et donc indispensables à la lecture et à l’écriture des textes même les plus simples. [3]
Jocelyne Giasson [4] a élaboré une liste de « petits » mots fréquents qui composent environ 50 % des textes de la langue française (pour enfants et pour adultes). Si les élèves peuvent reconnaitre spontanément ces mots fréquents, ils pourront consacrer plus d’attention aux autres mots de la phrase et améliorer ainsi leur fluidité en lecture. Ces mots n’ont pas toujours une signification en soi, alors ils doivent être enseignés en contexte, par exemple, lors des lectures partagées. Cliquer ici afin d’accéder à la liste de mots fréquents de Giasson.
Selon l’Observatoire national de la lecture, il importe d’attirer l’attention des élèves sur les patrons orthographiques afin de les aider à reconnaitre globalement les mots.
Mettre l’accent sur les particularités orthographiques du mot et les inconsistances de notre langue (le fait qu’un même phonème puisse s’écrire de plusieurs façons - o, au, eau) permet également d’attirer l’attention de l’enfant sur les caractéristiques orthographiques spécifiques des mots [5].
Le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport du Québec a élaboré une liste de mots fréquents que les élèves doivent apprendre chaque année au cycle primaire. Ce document pourrait servir de guide pour choisir des patrons orthographiques pour les activités d’étude de mots. Cliquer ici afin d’accéder à la Liste orthographique à l’usage des enseignantes et des enseignants.
Les affiches ci-dessous offrent d’autres stratégies pédagogiques pour l’enseignement de la reconnaissance globale. Pour lire l’article intégral qui accompagne ces affiches, cliquer ici afin d’accéder à l’article Apprendre au cerveau à lire : stratégies pour améliorer le décodage, la fluidité et la compréhension de lecture.
Stratégies d’identification des mots
« Le déchiffrage est une condition nécessaire mais non suffisante à la mémorisation des formes orthographiques. Des difficultés pourraient provenir soit de difficultés générales à mémoriser les informations visuelles soit de difficultés spécifiques à analyser simultanément l’ensemble des lettres des mots [6].»
Le simple fait d’être exposés aux mots fréquents et aux patrons orthographiques est souvent insuffisant pour que les élèves ayant des TA améliorent leurs habiletés de décodage. Il est primordial de leur offrir un enseignement explicite des stratégies d’identification de mots, ainsi que de les initier aux stratégies métacognitives en les questionnant.
Le professionnel de l’enseignement doit modéliser les stratégies d’identification de mots tout en expliquant :
- pourquoi la stratégie choisie est utilisée pour le mot donné;
- comment utiliser efficacement la stratégie choisie; et
- comment vérifier si la stratégie a donné le bon mot.
Les stratégies ci-dessous, adaptées du programme anglais WIST aident les élèves à décoder des mots inconnus. L’enseignement de ces stratégies dépend d’un recueil de 60 mots clés fréquents en français. Cliquer ici afin d’accéder à la liste de mots clés fréquents.
1) L’identification du mot par l’analogie
« Si je peux lire lac, je peux lire sac. » [7]
L’identification du mot par l’analogie, par la rime ou par les familles de mots est une stratégie qui commence par l’enseignement d’une liste de mots clés (voir ci-dessous). Au cours des leçons liées à cette stratégie, l’analogie est travaillée à partir de la rime des mots. Les élèves apprennent à comparer un mot non familier à un mot clé qu’ils connaissent déjà. Grâce à un enseignement explicite, les élèves apprennent à appliquer le raisonnement analogique pour décoder des mots nouveaux. Par exemple, les mots clés, mon, ton ou son, servent à identifier le mot menton.
2) L’identification des parties connues (l’espion)
montagne : mon + ta + gne
La recherche des parties connues dans le mot est une stratégie plus communément appelée l’espion. Au cours des leçons liées à cette stratégie, on enseigne aux élèves à rechercher un mot ou une partie de mot à l’intérieur d’un plus grand mot. Par exemple, l’élève pourra identifier les parties mon et ta qui correspondent à des mots clés enseignés pour décoder le mot montagne.
3) L’identification par pelage de mot
recommencement : re + commence + ment
L’identification par pelage de mot consiste en la suppression des affixes dans les mots multisyllabiques. Les préfixes et les suffixes les plus fréquents (p.ex., re, sur, pré, trans, age, ette, eur, erie, ier, ment) sont enseignés comme des mots clés au début du programme. Puis, le professionnel de l’enseignement montre aux élèves à identifier les préfixes en début de mot et les suffixes à la fin des mots, réduisant ainsi un mot non familier à un mot plus court et plus facile à identifier. Par exemple, on élimine le re et le ment au mot recommencement pour ne laisser que la racine commence.
Pour en savoir plus sur ces stratégies et l’adaptation du programme WIST en français, cliquer ici afin d’accéder à l’article Programme WIST: une approche visant l’amélioration de la procédure de traitement orthographique chez les élèves ayant des troubles d’apprentissage en lecture.
Pour en apprendre plus, cliquez ici pour consulter l'article La conscience morphologique : un levier important lorsque les mots s’allongent pour les lecteurs en difficulté.
Stratégies d'enseignement
Il est important d’adhérer à une progression dans l’apprentissage des graphèmes, du plus simple au plus complexes [8] et de porter une attention particulière aux graphies qui sont difficiles pour plusieurs élèves. Ces graphies comprennent les groupes consonantiques CCV avec les lettres L et R, qui sont présentes dans plusieurs patrons syllabiques (p. ex., bl/br, pl/pr, fl/fr), les graphies dont la prononciation change selon les lettres avoisinantes (p. ex., c, g, s, t, e, i) et les lettres muettes. Ainsi, je peux planifier un enseignement explicite centré sur les actions des élèves et choisir des activités rééducatives en fonction de leurs besoins pour mieux les guider.
Présentation du phonème (le son) et de la lettre (la graphie)
Pour établir la relation entre le phonème (le son) et la lettre (la graphie), je présente habituellement cinq mots pour introduire le son. L’usage des marqueurs de couleur et des « post-it » me sont très utiles pour mettre en évidence les graphies qui composent le son vedette de la semaine, mais aussi pour créer des référentiels. En même temps, j’invite les élèves à trouver des mots contenant le son vedette. Les élèves apprennent à repérer le son qui parfois peut être difficile à identifier lorsque celui-ci est placé au milieu d’un mot.
La production du phonème et l’analyse des gestes articulatoires
Chaque lettre est associée à un son. Ce son se différencie des autres sons de la langue plus ou moins fortement. Pour maitriser cette différenciation, il est utile de fournir aux élèves des occasions de prononcer à haute voix chaque nouveau son et d’analyser la façon dont il produit ce son. Il se trouve alors à l’objectiver et se l’approprier pour soutenir le décodage des mots. Les élèves n’ont pas toujours conscience des gestes articulatoires qui permettent de différencier les phonèmes entre eux. Une analyse guidée de ce qu’ils entendent, de ce qu’ils voient (p. ex., la forme de leur bouche et de leurs lèvres) ou de ce qu’ils sentent (p. ex., la position de leur langue) peut leur fournir des indices pour différencier les sons de la parole entre eux et soutenir la segmentation d’une chaine de phonèmes (p. ex., /flu/ → f-l-ou).
Identification des phonèmes dans un mot
L’oralisation des mots est privilégiée pour développer l’écoute et la segmentation syllabique ou phonémique des mots. Avec la pratique, les élèves parviennent à manipuler avec aisance les différents sons (p. ex., identifier le son vedette, séparer tous les sons dans un mot, fusionner des sons pour former un mot, remplacer un phonème par un autre pour former un nouveau mot, compter le nombre de fois que le son vedette s’y trouve, etc.).
La segmentation syllabique et le décodage de mots
Lorsque l’élève prend conscience du lien qui existe entre les sons et les lettres et qu’il parvient à segmenter les syllabes dans les mots qu’il rencontre, sa capacité de décoder des mots contenant plusieurs syllabes augmente. La lecture de syllabes (CV, CCV, CVC), de pseudo-mots et de mots moins familiers conduit l’élève à analyser des structures syllabiques de plus en plus complexes et à reconnaitre les mots de plus en plus rapidement dans un texte. Il est nécessaire de faire ce lien entre la connaissance des lettres et des sons par l’écriture. À l’aide d’un tableau blanc effaçable, les élèves peuvent tenter d’analyser la structure syllabique de mots reçus à voix haute. C’est alors que je les entends répéter le mot, étirer les syllabes et les faire les sons individuellement. Au début, je n’insiste pas sur une production orthographique parfaite, mais bien sur une correspondance juste entre les lettres et les sons pour former le mot.
L’enseignement des sons doit être amusant, rythmé et motivant 1. Les élèves développent une curiosité naturelle et un désir d’apprendre lorsqu’ils sont capables de lire de vrais mots plutôt que de recourir au « devinement ». Ils en retirent une fierté et du plaisir à lire avec justesse et ce sentiment s’accroit au fil du temps. Pour conduire un élève ayant un trouble d’apprentissage à vouloir lire des romans, même en gros caractères, il est nécessaire de revenir à la base. Chaque petit pas compte!
Références
[1] Ministère de l’Éducation de l’Ontario, 2003b, p. 3.1
[2] Ministère de l’Éducation de l’Ontario, 2003a, p. 27
[3] L’Observatoire national de la lecture, 2007, p. 29
[4] Giasson, 1995
[5] L’Observatoire national de la lecture, 2007, p. 18
[6] L’Observatoire national de la lecture, 2007, p. 29
[7] Ministère de l’Éducation de l’Ontario, 2005, p. 104
[8] Sprenger-Charolles, 2017