Par Frédéric Guay, Chaire de recherche du Canada en motivation, persévérance et réussite scolaires, Université Laval
Soutenir efficacement la motivation des élèves rencontrant des difficultés d’apprentissage est un défi important pour toute personne qui enseigne ou qui offre des services à ces élèves. Faisant face à des difficultés à mettre en place des stratégies ou des comportements qui leur permettent d’apprendre au même rythme que les autres élèves dans une ou plusieurs matières scolaires, ces élèves en viennent souvent à être découragés et à se percevoir comme incompétents. En effet, des recherches indiquent que les élèves rencontrant des difficultés d’apprentissage sont plus susceptibles d’entretenir une perception indiquant qu’ils sont plus ou moins bons à l’école (p.ex., Bear, Minke, & Manning, 2002). De plus, ces élèves tendent à attribuer leurs difficultés à des déficits personnels (Sideridis, 2009) et certains d’entre eux en viennent même à penser que lorsqu’ils réussissent, cela n’a rien à voir avec les efforts qu’ils ont déployés, mais plutôt à la chance (Nunez et coll., 2005). Ce texte traite de la manière dont les acteurs du milieu scolaire peuvent soutenir la motivation des élèves rencontrant des difficultés d’apprentissage. Contrairement à certains stéréotypes voulant que ces élèves aient besoin d’un encadrement plus serré, voire contrôlant, pour s’engager dans leurs apprentissages, nous développons un argumentaire, à partir de résultats de recherche, pour montrer tout le contraire. Dans les sections qui suivent, la motivation scolaire et ses conséquences sont définies, de même que les besoins psychologiques favorables à cette motivation et les pratiques pédagogiques qui comblent de tels besoins.
La motivation scolaire et ses conséquences
La motivation est considérée comme une réserve d’énergie qui est dirigée vers l’atteinte d’un but (Ryan & Deci, 2017). La motivation scolaire n’est pas un trait de personnalité à partir duquel nous pourrions qualifier un élève de peu ou pas motivé. Au contraire, la motivation scolaire varie chez un même élève. Parfois, elle est élevée, quelquefois elle est plus faible. Par exemple, un élève peut être motivé par le contenu d’une matière et très peu par un autre. Bien que cette motivation soit en partie innée (Kovas et coll., 2015), il demeure que nous avons des leviers pour l’augmenter, notamment à partir des tâches que l’on propose aux élèves et du contexte éducatif dans lequel ils apprennent.
Quand on définit la motivation, on cherche surtout à comprendre les raisons qui animent un comportement ou une action donnée. Par exemple, Maxime et Pénélope peuvent avoir des raisons différentes de s’engager dans des tâches de mathématiques. Pour Maxime, son engagement résulte d'une crainte que ses parents le chicanent s’il ne s’investit pas selon les attentes de ces derniers, alors que l’engagement de Pénélope repose tout simplement sur le plaisir d’apprendre. Selon la théorie de l’autodétermination (Ryan & Deci, 2017), ces raisons qui sous-tendent l’apprentissage de nos deux protagonistes ne sont pas équivalentes. Pénélope a plus de chance de réussir que Maxime en mathématiques. Pourquoi? Parce que le comportement de Pénélope est plus autodéterminé. En effet, cette théorie propose différents types de motivation qui varient selon leur niveau d’autodétermination et que cette autodétermination serait associée au développement des compétences des élèves. L’autodétermination renvoie à un aspect volitif et donc à cette impression d’être à l’origine de ses actions, sans qu’aucune pression ni interne (anxiété de performance) ni externe (des menaces) ne vienne à réguler le comportement.
Cette théorie propose 5 types de motivation. Au plus faible niveau d’autodétermination, on retrouve l’amotivation. Dans cet état motivationnel, l’élève ne voit pas de bonne raison à s’engager dans ses activités scolaires. Un tel état motivationnel peut découler d’un manque d’intérêt envers l’école ou encore d’un sentiment d’incompétence. À un niveau un peu plus élevé d’autodétermination, on retrouve la régulation externe. Ce dernier type de motivation fait référence à des comportements d’apprentissage qui sont réalisés pour obtenir une récompense ou éviter une punition. Par exemple, Mathieu peut lire, car ses parents lui ont promis un montant d’argent pour chaque livre lu ou encore lire pour éviter d’être expulsé de son cours de français. Un autre type de motivation qui est un peu plus autodéterminé est la régulation introjectée. À ce niveau, une personne émet des comportements dans le but de présenter une image de soi positive aux autres, de se faire remarquer, ou encore d’éviter des émotions déplaisantes comme la honte, l’anxiété ou la culpabilité. Par exemple, si Julie étudie de nombreuses heures son examen de mathématique pour diminuer son anxiété de performance, on dira alors qu’elle fait preuve de motivation introjectée. La régulation identifiée, quant à elle, est vraiment plus autodéterminée. Un élève qui est animé par ce type de motivation trouve important d’effectuer des activités d’apprentissage et de développer ses compétences, même si cette activité n’est pas toujours intéressante en soi. Apprendre ses tables de multiplication est pour plusieurs élèves une activité plus ou moins intéressante. Cependant, celle-ci peut être jugée importante par les élèves pour accomplir différentes opérations mathématiques. Enfin, la régulation intrinsèque est la forme de motivation la plus autodéterminée. Elle se définit par le plaisir et la satisfaction qu’éprouve l’élève envers ses apprentissages. Un élève intrinsèquement motivé par les mathématiques pourrait en venir à demander à ses parents de lui acheter des jeux dans lesquels il peut résoudre différentes opérations mathématiques.
Les motivations définies ci-dessus se situent donc sur un continuum d’autodétermination allant du plus faible au plus élevé. Dans l’ordre on retrouve donc l’amotivation, la régulation externe, la régulation introjectée, la régulation identifiée et enfin celle intrinsèque. Cette manière de concevoir la motivation est importante, car elle suppose qu’émettre des comportements selon des motivations autodéterminées est plus salutaire pour le développement du plein potentiel de tout un chacun, y compris celui des enfants rencontrant des difficultés d’apprentissage. Autrement dit, l’autodétermination est une petite boussole que nous avons à l’intérieur de nous qui nous indique si on tient le cap ou non vers le développement de notre plein potentiel. Si cette boussole nous indique que nos comportements sont motivés par des régulations intrinsèque ou identifiée, alors nos chances sont bonnes d’atteindre ce plein potentiel. En revanche, si notre boussole nous indique que nos comportements sont amotivés ou motivés par introjection ou régulation externe, nos chances d’atteindre ce plein potentiel sont alors davantage compromises. Est-ce que cette boussole « motivationnelle » fonctionne relativement bien? La réponse à cette question est oui selon la recherche actuelle. En effet, une méta-analyse qui regroupe des centaines d’échantillons comportant plus de 200 000 élèves répartis dans plusieurs pays (Howard et coll., 2021) montre que les élèves motivés intrinsèquement et par régulation identifiée réussissent mieux leurs études et persévèrent davantage et sont plus satisfaits de leurs parcours scolaires que ceux qui sont amotivés, régulés extrinsèquement ou par introjection. Il y a donc des bénéfices à bien aiguiller notre boussole motivationnelle, mais aussi à connaitre dans quelle direction pointe la motivation des élèves qui composent une classe. Mais justement, comment pouvons-nous assurer que cette boussole fonctionne bien? Quelles sont les actions que nous devons entreprendre pour aider les élèves à vivre des motivations plus positives? C’est la question à laquelle la prochaine section tente de répondre.
Les besoins psychologiques favorables à la motivation scolaire
Le fonctionnement d’une boussole est relativement simple. L’aiguille est attirée par le magnétisme des pôles Nord et sud de la terre. Pour que la boussole fonctionne, il faut donc une force externe pour faire bouger l’aiguille. La motivation humaine fonctionne un peu de la même manière. Pour qu’une personne développe des motivations plus autodéterminées (intrinsèque et identifiée), il est important qu’une source externe joue son rôle en nourrissant les besoins psychologiques universels de compétence, d’autonomie et d’appartenance sociale. En effet, la théorie de l’autodétermination propose que ces besoins soient essentiels au développement de tout être humain. Ils seraient donc un rempart important afin que l’humain ne perde pas le « Nord ». La notion de besoin est importante dans cette théorie, car comme les besoins physiologiques, si ceux psychologiques ne sont pas comblés, voire frustrés, la personne éprouvera de sérieux problèmes avec sa boussole motivationnelle et donc avec le développement de son plein potentiel.
Le besoin de compétence renvoie au fait de se sentir compétent dans les activités que l’on poursuit. Il s’agit d’une impression subjective de l’élève envers ses habiletés. Par exemple, certains élèves peuvent carrément surestimer leurs compétences, alors que d’autres peuvent les sous-estimer et d’autres avoir une vision réaliste de leurs compétences. D’ailleurs, les élèves rencontrant des difficultés d’apprentissage ne semblent pas échapper à cette réalité. Ils ne font pas que se sous-estimer, ils peuvent aussi se surestimer et estimer correctement leurs compétences. La surestimation des habiletés peut toutefois empêcher certains élèves rencontrant des difficultés d’acquérir des stratégies qui leur permettront de s’améliorer. Il est donc important de rectifier le tir à cet égard. On peut penser que ces élèves présentent une image surconfiante d’eux afin de protéger leur égo (Klassen, 2002).
Le besoin d’autonomie, quant à lui, se définit par notre désir d’être à l’origine de nos actions et de nos comportements et donc libre de toutes pressions que celles-ci soient internes (culpabilité) ou externes (une récompense). Il est important de ne pas confondre une absence de pression avec une absence de règle. Au quotidien, les enfants vivent avec des règles à l’école et à la maison et celles-ci sont salutaires pour leur développement. Cela ne veut pas dire pour autant que ces règles sont en opposition avec la satisfaction de leur besoin d’autonomie. En effet, bien qu’il n’y ait aucun intérêt réel à se brosser les dents ou à faire son lit, de nombreux enfants ont intégré ces règles de manière pleinement autodéterminée.
Enfin, le besoin d’appartenance se définit par le fait d’entretenir des relations positives, significatives et chaleureuses avec autrui qui sont réciproques. Lorsque ces trois besoins sont comblés, il en résulte des régulations du comportement plus autodéterminées, dont celles intrinsèque et identifiée. À l’inverse, lorsque ces besoins sont frustrés, il en résulte des régulations externe et introjectée voire de l’amotivation.
Selon une méta-analyse qui porte sur le rôle des besoins psychologiques dans le développement de la motivation scolaire des élèves (Bureau et coll., 2022), il semblerait que la satisfaction des besoins d’autonomie et de compétence est importante pour soutenir des motivations scolaires plus autodéterminées. En revanche, le besoin d’appartenance joue un rôle beaucoup plus faible pour expliquer la motivation autodéterminée.
En résumé, pour que la boussole motivationnelle des élèves indique le bon chemin à suivre, il est important, voire fondamental, d’offrir un contexte qui permet aux élèves de satisfaire leurs trois besoins psychologiques. Sans un tel contexte, la boussole motivationnelle pointera vers l’introjection, la régulation externe voire l’amotivation qui sont des motivations plus ou moins optimales pour le développement du plein potentiel des élèves. Plus précisément, plus les besoins sont frustrés par le contexte, plus l’élève devrait être « amotivé ». Ci-après, il est question d’une série de comportements ou de pratiques qui sont favorables à la satisfaction de chacun des besoins psychologiques et donc à la motivation autodéterminée des élèves. Une attention toute particulière sera portée aux élèves rencontrant des difficultés d’apprentissage; élèves pour qui les trois besoins psychologiques peuvent être davantage frustrés.
Les formes de soutien et les besoins psychologiques des élèves
Dans cette section, il est question de trois types de soutien qui se sont avérés efficaces pour mobiliser la motivation des élèves, y compris ceux qui rencontrent des difficultés d’apprentissage. Il s’agit du soutien au besoin de compétence, au besoin d’autonomie et au besoin d’appartenance sociale. Il est surtout question ici des comportements de soutien offerts par les enseignants, mais les parents et d’autres intervenants scolaires peuvent les adapter afin de favoriser la motivation autodéterminée des élèves.
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Le soutien au besoin de compétence
Pour offrir un soutien efficace à la compétence, il faut tout d’abord comme professionnel ou parent avoir la profonde conviction que nos actions peuvent aider les élèves à mieux réussir et que si celles-ci n’apportent pas les fruits escomptés, elles doivent être améliorées. Ainsi, la progression dans les apprentissages ne repose pas uniquement sur les épaules de l’élève, mais aussi sur notre capacité à s’adapter aux besoins des élèves afin de soutenir une telle progression. Lorsque l’on parle de soutien à la compétence, on fait surtout référence aux rétroactions que l’on offre aux élèves. La rétroaction est définie par l’information que l’on donne suite au déploiement d’une compétence ou d’un apprentissage (Hattie & Timperley, 2007). Cette information doit s’avérer « utile » pour réduire l’écart entre la performance actuelle de l’apprenant et celle qui est attendue par la personne en position d’autorité. Donc l’information fournie à l’apprenant doit être suffisamment spécifique pour qu’il puisse s’améliorer ou comprendre pourquoi il a atteint les critères de réussite. Des commentaires comme « tu as bien réussi, félicitations » ou encore « tu es vraiment doué » sont peu informatifs et ne permettent pas à l’élève de comprendre quelles sont les stratégies qu’il a mises en place pour atteindre les critères de réussite. L’inverse est aussi vrai lorsque l’élève rencontre des difficultés. Par exemple, un élève a des difficultés dans ses multiplications de nombres entiers qui comportent plus de 2 chiffres. L’enseignant lui indique ses erreurs, sans s’attarder au processus de résolution. Il attribue les erreurs de l’élève à de l’inattention. Dans un tel cas, l’erreur se répétera, car elle est le fruit d’une stratégie mal comprise. Autrement dit, les élèves tirent profit de la rétroaction lorsque celle-ci: 1) les aide non seulement à comprendre les erreurs qu'ils ont commises, mais 2) aussi à comprendre pourquoi ils les ont faites et 3) comment ils peuvent les éviter (Wisniewski, Zierer, & Hattie, 2020). Par exemple, un élève qui doit rédiger un texte argumentatif pourrait recevoir en guise de modèle un texte réalisé par un autre élève. Toutefois, si le texte qui sert de modèle n’est pas décortiqué par l’enseignant sur le plan des étapes à suivre et adapté au niveau de compétence des élèves, ce modèle aura fort peu d’impact sur la production écrite des élèves en difficulté d’apprentissage. Pour qu’un modèle mobilise la motivation des élèves rencontrant des difficultés, il doit représenter un niveau de réussite atteignable. Ensuite, lors du processus d’écriture, l’enseignant doit modeler les stratégies à mettre en place et fournir des rétroactions constantes qui permettent à l’élève de s’améliorer.
Le soutien au besoin d’autonomie
Face à un enfant qui rencontre des difficultés d’apprentissage, nos réactions ne sont pas les mêmes que pour les élèves qui ne rencontrent pas ces difficultés. Souvent, on pense que la meilleure façon de les aider à réussir à l’école est de les contrôler en les menaçant de certaines conséquences à venir s’ils ne se conforment pas aux exigences ou encore en leur promettant une récompense. Souvent des parents découragés de voir leurs enfants rencontrant des difficultés en lecture fuir cette activité en viennent à leur promettre une récompense pour les inciter à lire. Comme si lire davantage était la meilleure stratégie pour pallier ces difficultés. Si un enfant évite de lire, c’est peut-être parce qu’il ne comprend pas ce qu’il lit à cause de son manque de vocabulaire, d’une dyslexie ou d’un trouble primaire du langage. Lire plus parce qu’on est récompensé ne résoudra pas ces difficultés. Comme mentionné plus haut, une récompense n’offre pas une rétroaction spécifique et ne renseigne aucunement l’élève sur les stratégies à déployer pour faciliter sa compréhension. Bref, une stratégie motivationnelle qui passe par la récompense est normalement à proscrire. Que faire alors? Comme pour tous les élèves de la classe, il est important de soutenir le besoin d’autonomie des élèves rencontrant des difficultés. Le soutien à l’autonomie renvoie au fait d’offrir aux élèves certains choix, de reconnaitre leurs sentiments et de leur faire confiance en ce qui a trait à leur capacité d’être proactifs dans leurs apprentissages.
Afin de soutenir l’autonomie des élèves, l’enseignant doit leur expliquer pourquoi il met en place des règles, pourquoi les notions apprises sont importantes ou encore pourquoi il demande de réaliser certaines activités pédagogiques. Soutenir l’autonomie, c’est aussi enseigner des notions dans un contexte qui est signifiant pour l’élève où le travail effectué n’a pas pour seul but une évaluation de la part de l’enseignant, mais a un impact réel dans la vie de l’enfant. À cet égard, de nombreuses recherches ont montré l’importance des situations authentiques d’apprentissage pour mobiliser la motivation des élèves. Il s’agit donc de cultiver le plaisir d’apprendre et s’il y a lieu de différencier les tâches afin de susciter l’intérêt de tout un chacun. De nombreuses recherches (Bureau et coll., 2022) ont montré l’importance du soutien à l’autonomie pour nourrir le besoin d’autonomie des élèves et ainsi favoriser la motivation scolaire. D’ailleurs ce soutien à l’autonomie serait plus important chez les enseignants que chez les parents pour mobiliser cette motivation à apprendre. À l’inverse, le contrôle qui s’exerce par les récompenses et les punitions est peu ou pas souhaitable pour mobiliser la motivation, sauf si les tâches que l’on offre sont peu ou pas intéressantes et que les habiletés déployées sont peu complexes. En m’appuyant sur des données probantes (Deci et coll., 1999), il est recommandé aux enseignants de ne pas mettre en place un système de récompense dans leur classe, mais plutôt à miser sur la qualité de la tâche et sur le contexte d’apprentissage. Une telle stratégie a plus de chance de favoriser l’émergence d’une motivation autodéterminée envers les apprentissages et les compétences à déployer.
Le soutien au besoin d’appartenance
Il est reconnu que les élèves accordent une importance à la qualité des relations qu’ils entretiennent avec leurs enseignants et leurs pairs de la classe. Souvent lors d’une transition d’une école à une autre, le but des élèves n’est pas de réussir leurs cours, mais de se faire des amis et de se sentir acceptés par des adultes en position d’autorité. Lorsque l’élève entretient des relations positives à l’école, il en résulte une motivation scolaire plus autodéterminée (Guay, Denault, & Renaud, 2017). Comment les enseignants peuvent-ils s’y prendre pour nourrir ce besoin d’appartenance chez les élèves? L’un des tout premiers piliers consiste à émettre des comportements de bienveillance et montrer aux élèves qu’ils sont importants pour nous autant dans leur vie scolaire que dans d’autres aspects de leur vie. Il s’agit aussi de minimiser les conflits avec les élèves et le rejet qui peuvent se manifester chez l’enseignant par de la colère, de l’irritabilité et des comportements hostiles (Hofkens & Pianta, 2022). Dans cette perspective, un enseignant qui a vécu une situation difficile avec un élève peut prendre un peu de temps avec lui pour trouver des solutions au conflit. Une telle attention peut faire toute la différence pour maintenir, voire rehausser, la motivation autodéterminée d’un élève envers l’école (Humphrey, 2003). Néanmoins, les enseignants peuvent se sentir pressés par le temps. Sachant que les élèves n’ont pas atteint le niveau de compétence souhaité, les enseignants donneront plus de temps aux élèves pour apprendre, mais peut-être au détriment du temps qu’il aurait pu investir avec eux pour développer une relation de qualité.
Prenons l’exemple d’un élève qui dérange la classe avec ses comportements perturbateurs et qui a malheureusement développé une mauvaise relation avec son enseignant. Pour rétablir une qualité de relation entre l’élève et l’enseignant, il est important que ce dernier prenne du temps avec lui pour résoudre le conflit; d’essayer de comprendre pourquoi il agit de la sorte. Est-ce que des difficultés l’empêchent de s’engager dans ses activités? Aussi, il est important pour l’enseignant de lui montrer qu’il est disponible pour l’aider. Qu’il comprend ses difficultés et qu’il va essayer de trouver une solution avec lui. Donner plus de rétroactions positives pourrait aussi aider l’élève à s’engager davantage dans ses activités scolaires. Bref, il est important que l’enseignant brise la glace afin de rétablir une relation plus positive. Toutefois, pour accomplir cette intervention auprès du jeune, l’enseignant a besoin de temps et de ressources pour l’aider, ce qui n’est pas toujours le cas.
Conclusion
Dans ce texte, nous avons survolé les principaux types de motivations qui animent les élèves et mis en exergue les déficits motivationnels qui peuvent survenir chez les élèves qui rencontrent des difficultés d’apprentissage. Aussi, il a été question de la plus-value pour l’élève d’avoir des comportements d’apprentissage motivés de manière autodéterminée. Enfin, nous avons défini trois besoins psychologiques et montré comment ces derniers peuvent être soutenus efficacement par les enseignants. Enfin, au vu et au su des difficultés que rencontrent certains élèves dans leurs apprentissages, il nous apparait essentiel de créer un contexte qui est favorable au développement de leur plein potentiel. Entrer en conflit avec ces élèves et les contrôler n’est certainement pas la clé qui leur permet de bien progresser. Rencontrer des difficultés scolaires n’est pas de tout repos, si en plus les personnes qui entourent les enfants sont contrôlantes avec eux, ces derniers auront l’impression d’être doublement punis : par le fait de se sentir peu compétent à cause de leurs piètres résultats scolaires et ensuite par des commentaires directs ou indirects de la part des autres qui exacerbent un tel sentiment. Soutenir l’autonomie, la compétence et l’appartenance sont des ingrédients importants qui peuvent donner la motivation nécessaire aux élèves rencontrant des difficultés scolaires à apprendre.
Bibliographie
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Depuis 1998, Frédéric Guay est professeur à la faculté des sciences de l’éducation de l'Université Laval. En 2005, il a été professeur invité à l’université de Western Sydney. Il est titulaire de la Chaire de recherche du Canada de niveau 1 en motivation, persévérance et réussite scolaires. Récemment, il a reçu une mention du comité Whitworth pour sa contribution à la recherche en éducation au Canada. Il a été élu en 2014 président de la division educational, instructional, and school psychology de l’International Association for Applied Psychology. Enfin, il est l’auteur de 100 articles scientifiques, chapitres de livre et livres et a présenté plus de 200 communications scientifiques dans des congrès nationaux et internationaux. La grande majorité de ces publications et communications portent sur la motivation scolaire des élèves et des étudiants.
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