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par Kim Lockhart, M.Ed., enseignante d’immersion française
En 2015, le ministère de l’Éducation de l’Ontario a publié un document intitulé Inclure les élèves ayant des besoins particuliers dans les programmes de français langue seconde (FLS) dans le cadre de son engagement continu à s’assurer que les programmes de français langue seconde (FLS) soient plus inclusifs et bienvaillants aux élèves ayant différentes capacités d’apprentissage. Ce document visait à promouvoir les échanges entre les professionnels de l’enseignement, les administrateurs, les parents et les parents-substituts au sujet de l’inclusion des élèves ayant des différences d’apprentissage ainsi qu’à remettre en question les systèmes de croyances actuels concernant les élèves qui sont les mieux aptes à participer aux programmes de FLS et qui peuvent en tirer profit. Ce document se voulait également un outil destiné à aider les professionnels de l’enseignement à favoriser la réussite des élèves ayant des besoins particuliers dans le cadre des programmes de FLS.
La présente ressource a pour but d’appuyer les recommandations énoncées dans le guide précité et de présenter au personnel enseignant des programmes de FLS des stratégies pédagogiques précises conformes à ces recommandations ainsi que les résultats d’études de recherche en lecture en lien avec la façon dont les élèves apprennent à lire, à écrire et à parler la langue d’enseignement. À l’heure actuelle, bon nombre des recommandations du guide sont de nature générale et reposent sur un système de croyances, mais elles ne tiennent pas compte des stratégies pédagogiques fondées sur des données probantes pour aider les élèves à apprendre à lire et à écrire, ces aptitudes étant requises pour la réussite des élèves ayant des besoins particuliers dans le cadre des programmes de FLS. La présente ressource vise à combler cette lacune en proposant des stratégies fondées sur des données probantes qui sont essentielles pour les élèves qui apprennent différemment, qui sont efficaces pour tous les élèves et qui ne nuisent à aucun d’entre eux.
Pour que l’enseignement soit inclusif, il faut d’abord et avant tout croire que les élèves peuvent réussir dans le cadre des programmes de langue seconde, quelles que soient leurs aptitudes. Mais la magie réside dans la pédagogie. Non seulement les élèves doivent se sentir inclus dans ces programmes, mais aussi leurs besoins d’apprentissage doivent être satisfaits. L’élimination des obstacles qui empêchaient auparavant les élèves d’accéder à un programme d’immersion française ne suffit plus: le personnel enseignant doit accéder aux études de recherche qui montrent comment les élèves apprennent à lire et à écrire ainsi qu’à la formation offerte par des experts en littératie, pour mieux enseigner à une population croissante d’apprenants divers dans le cadre des programmes de FLS. Ainsi, un changement culturel dans les systèmes de croyances entourant les programmes de FLS doit également être accompagné d’un changement dans la formation générale des titulaires de classe afin que ceux-ci puissent être dûment formés et se sentir bien outillés pour répondre aux divers besoins d’apprentisage croissants des élèves des programmes de FLS.
Selon la description donnée dans le guide Inclure les élèves ayant des besoins particuliers dans les programmes de français langue seconde (FLS), l’éducation inclusive est une éducation basée sur les principes d’acceptation et d’inclusion de tous les élèves, ce qui concorde avec la description donnée dans d’autres documents du Ministère, notamment celui intitulé Comment tirer parti de la diversité : Stratégie ontarienne d’équité et d’éducation inclusive :
« ÉDUCATION INCLUSIVE : Éducation basée sur les principes d’acceptation et d’inclusion de tous les élèves. L’éducation inclusive veille à ce que tous les élèves se sentent représentés dans le curriculum et dans leur milieu immédiat de même que dans le milieu scolaire en général dans lequel la diversité est valorisée et toutes les personnes sont respectées. » (p. 4)
Un programme inclusif de FLS peut comprendre des élèves ayant des troubles de communication (p. ex., l’autisme), des troubles comportementaux (p. ex., un trouble oppositionnel avec provocation), une déficience intellectuelle (p. ex., une déficience intellectuelle légère), un handicap physique (p. ex., la paralysie cérébrale, la sclérose en plaques) ou des troubles concomitants ou multiples (p. ex., le TDAH et les troubles d’apprentissage, le TDAH et la douance). Grâce au système de croyances plus inclusif, les programmes de FLS de l’Ontario ont pris beaucoup d’expansion au cours des huit dernières années et reflètent maintenant ce mandat d’inclure davantage les différences en matière d’apprentissage.
Une partie de ce système de croyances se fonde sur le principe selon lequel les élèves apprennent à parler, à comprendre, à lire et à écrire dans une langue seconde uniquement en y étant exposés ou en étant placés en immersion dans un environnement linguistique enrichissant. En principe, les élèves apprennent à lire lorsqu’on leur fera la lecture, et ils apprennennt à écrire en observant comment les autres écrivent. Or, la recherche indique le contraire. Selon l’experte en lecture, Mme Louisa Moats, Ph. D. (2020), le cerveau humain est configuré pour apprendre le langage parlé, mais pas le langage écrit. Peu importe la langue d’enseignement, les élèves ont besoin d’un enseignement explicite, systématique des correspondances entres les sons et les symboles (les lettres). Cet enseignement doit aussi être fondé sur les principes du code, ce qui exige que les élèves apprennent les correspondances lettres-sons et qu’ils soient en mesure d’appliquer ces correspondances lorsqu’ils décodent et qu’ils encodent (p. ex., en épelant) phonétiqeument les mots . Il convient également de noter que les élèves n’apprennent pas tous les correspondances lettres-sons au même rythme et qu’ils n’ont pas tous besoin d’un enseignement fondé sur le code de la même intensité : certains élèves apprendront le code avec un minimum d’enseignement, tandis que d’autres auront besoin d’un enseignement intensif des correspondances sons-lettres ainsi que de multiples répétitions et occasions de s’exercer. Cet enseignement fondé sur le code constitue un des aspects d’une approche globale de l’enseignement de la lecture reposant sur des données probantes.
En 2001, l’International Dyslexia Association of Ontario (IDA) a défini la littératie structurée comme étant une approche globale de l’enseignement de la littératie qui est efficace pour tous les élèves et qui est essentielle pour les élèves présentant une déficience de lecture, telle que la dyslexie. Cette approche pourrait également être désignée comme « la science de la lecture » ou « l’enseignement de la littératie fondé sur des données probantes ». Elle se caractérise par la prestation d’un enseignement systématique et explicite qui intègre l’écoute, la parole, la lecture et l’écriture. Elle enseigne la structure de la langue dans le système des sons conversationnels (phonologie), le système d’écriture (orthographe), la structure des phrases (syntaxe), les parties significatives des mots (morphologie), les relations entre les mots (sémantique) et l’organisation du discours oral et du discours écrit (IDA Ontario, 2001). Ces éléments sont tous aussi importants les uns que les autres dans l’enseignement de la lecture et de l’écriture en français. Il est important que le personnel enseignant d’une langue seconde reconnaisse qu’une approche de l’enseignement de la littératie fondée sur des données probantes est aussi efficace et essentielle dans le cadre de l’immersion française que dans le cadre de l’enseignement en anglais. En d’autres mots, une approche globale de la lecture et de l’écriture peut et doit être utilisée dans les classes d’immersion française comme dans les classes d’anglais, afin d’atteindre davantage d’apprenants.
La liste suivante vient compléter le document intitulé « Inclure les élèves ayant des besoins particuliers dans les programmes de français langue seconde (FLS) » en proposant des stratégies efficaces fondées sur des données probantes qui sont essentielles pour les élèves ayant des troubles d’apprentissage, mais qui sont aussi efficaces pour tous les élèves en français langue seconde. » en proposant des stratégies hautement efficaces fondées sur des données probantes qui sont essentielles pour les élèves ayant des troubles d’apprentissage, mais qui sont aussi efficaces pour tous les élèves en français langue seconde.
Le langage oral
Le langage oral se situe au cœur même d’une approche globale de l’enseignement de la littératie fondée sur des données probantes. Les études de recherche révèlent que les habiletés en langage oral constituent un facteur prédictif du rendement d’un enfant en lecture (NICHD Early Child Care Research Network, 2005). Les habiletés langagières orales jouent un rôle essentiel, car elles favorisent la conscience phonémique (la compréhension du fait que le langage oral peut être manipulé), l’enrichissement du vocabulaire dans la langue d’enseignement et l’acquisition d’habiletés en écoute qui aident à comprendre le langage parlé. Cliquez ici pour accéder au document Favoriser le développement du langage oral en classe.
Dans une classe de français langue seconde, les gestes de la main, les expressions faciales et le langage corporel constituent d’importants outils pédagogiques qui favorisent l’acquisition du français oral chez les élèves qui étudient en français langue seconde. Les gestes et les expressions faciales permettent aux élèves de donner un sens au langage parlé. Les études de recherche laissent entendre que les élèves comprennent mieux et se rappellent davantage ce que les membres du personnel enseignant leur disent lorsque des gestes de la main accompagnent les mots, et que les gestes représentationnels approfondissent la compréhension (Hostetter, A.B., 2011). Par exemple, une enseignante en immersion française au jardin d’enfants pourrait pointer la porte en disant « Va à la porte » et en marchant jusqu’à la porte pour indiquer aux élèves ce qu’elle attend d’eux. Lorsque les émotions sont enseignées à une classe de 3e année de français du programme-cadre, l’enseignant peut utiliser des expressions faciales pour montrer la gamme des émotions afin que les élèves puissent associer le mot à l’oral à l’expression faciale et au sentiment dont il en est question (p. ex., froncer les sourcils signifie que la personne est malheureuse ou triste = sad). Par ailleurs, tous les élèves en français langue seconde peuvent profiter de l’utilisation d’aides visuelles, comme des photos ou des dessins, pour comprendre plus facilement le langage oral. Dans le cadre d’une étude menée auprès d’apprenants d’une langue seconde (Haber, 1970), il fut constaté que les images ont aidé les élèves à consolider et à organiser leur mémoire verbale. Il fut découvert que les enfants se souvenaient considérablement mieux des mots enseignée avec des aides visuelles que les enfants du groupe témoin qui n’avaient pas eu accès à de tels appuis. En salle de classe, par exemple, lorsque l’enseignant du français langue seconde décrit les rôles des membres de la collectivité pendant une leçon en études sociales de 1re année, il devrait utiliser des images de policiers en uniforme, de facteurs, de médecins et d’enseignants, tout en tenant compte de la diversité culturelle des membres de la collectivité. De plus, il ou elle devrait donner aux élèves de nombreuses occasions d’utiliser les nouveaux mots de vocabulaire en prévoyant des discussions soigneusement étayées, en leur posant des questions ouvertes et en organisant des activités en petits groupes.
La conscience phonémique
La conscience phonémique est la capacité de percevoir et de manipuler les sons du langage oral. Elle est essentielle à l’apprentissage de la lecture et de l’écriture parce que les élèves doivent être en mesure de fusionner les sons pour pouvoir décoder les mots (lire) et de reconnaître les sons prononcés individuellement pour pouvoir encoder les mots (épeler/écrire) en établissant une correspondance entre le graphème (la ou les lettres) et chaque phonème (chaque son) d’un mot. Les difficultés liées à la conscience phonémique caractérisent les élèves qui sont moins performants en lecture. Toutefois, grâce à un dépistage précoce et à des interventions appropriées et intensives, les enfants peuvent acquérir cette habileté et éviter que leurs difficultés en lecture deviennent plus sévères au fil du temps.
La fusion de sons individuels pour produire un mot constitue une habileté essentielle au décodage des mots. Par exemple, une enseignante peut appliquer la stratégie « tape-tape-glisse » en utilisant son bras allongé : elle prononce le son au début d’un mot en tapant son épaule; puis elle prononce le son au milieu du mot en tapant l’intérieur de son bras; enfin, elle prononce le son à la fin du mot en tapant sur son poignet. Les élèves répètent chacun des trois sons et des trois gestes, puis font glisser leur doigt tout le long de leur bras pour prononcer le mot au complet en fusionnant les sons. Il est possible de différencier cette activité en augmentant la complexité des mots; il suffit de passer de mots à deux phonèmes (sons) à des mots à cinq phonèmes ou plus!
Une autre habileté essentielle en conscience phonémique consiste à apprendre à segmenter les mots en isolant leurs sons individuels. L’enseignant peut utiliser un abaque pour démontrer comment les mots peuvent être découpés ou segmentés en sons individuels. À l’aide du modèle « Je le fais, Nous le faisons, Tu le fais », il ou elle segmente un mot en déplaçant une boule chaque fois qu’un son est isolé du mot. Les élèves segmentent ensuite le mot avec l’enseignant et, enfin, l’enseignant demande à certains élèves de segmenter le mot seuls.
La phonétique
L’enseignement de la phonétique montre la relation qui existe entre les lettres (ou des combinaisons de lettres) et les sons. Les élèves en immersion française doivent apprendre les correspondances son-lettre propres à la langue française pour pouvoir lire et écrire de façon efficace. Une approche globale de l’enseignement de la littératie fondée sur des données probantes comprend l’enseignement explicite et guidé par l’enseignant de la phonétique, afin que les élèves n’aient pas à deviner les sons des lettres dans les mots et les textes. Les correspondances lettres-sons sont enseignées de façon isolée et les élèves ont l’occasion de mettre en pratique ces correspondances dans un texte décodable. L’enseignement explicite de la phonétique profite à tous les élèves, mais il est essentiel pour les élèves qui ont des troubles d’apprentissage, afin qu’ils acquièrent de solides habiletés en décodage, ce qui ne peut se faire uniquement en apprenant des mots complets par cœur.
Les cartes-éclairs constituent l’un des outils pédagogiques fondés sur des données probantes les plus efficaces pour l’enseignement de la phonétique. Il s’agit de fiches sur lesquelles sont écrit des lettres. Cette approche multisensorielle de l’enseignement de la phonétique peut servir à enseigner la phonétique à une classe tout entière (Niveau 1), à de petits groupes en orthopédagogie (Niveau 2) ou individuellement dans le cas d’élèves qui ont besoin d’un soutien très intensif en la matière et de nombreuses occasions de s’exercer (Niveau 3). Lorsqu’elle sont utilisées dans le cadre d’un programme de phonétique global en français, suivant une méthode d’eseignement logique, les cartes-éclairs sont des outils pédagogiques économiques, mais hautement efficaces, auxquels tout le personnel enseignant peut accéder.
Les cartes-éclairs sont réparties en trois ensembles de couleurs distinctes : les consonnes sont écrites sur des fiches blanches, les voyelles, sur des fiches jaunes, et les sons complexes (p. ex., oi, eau, euille), sur des fiches roses. La méthode d’enseignement, voire la portée et la séquence, soit respecter un niveau de difficulté progressif pour permettre de passer des correspondances lettres-sons simples à des correspondances plus complexes. Il importe également de noter que l’approche pédagogique est tout aussi importante, voire plus importante, que la ressource même, et que les cartes-éclairs ne seront utiles que si elles sont utilisées efficacement. L’enseignant commence par montrer la fiche illustrant un graphème (un lettre) aux élèves. Il ou elle prononce ensuite le son correspondant et demande aux élèves de le répéter. Par la suite, il ou elle demande aux élèves de dire un mot qui commence par ce son, ce qui active leur système phonologique. Tout au long de l’année scolaire, l’enseignant ou l’enseignante élargit la portée et la séquence des sons en intégrant de nouvelles cartes-éclairs, une fois que les cartes-éclairs précédentes ont été bien assimilées, et il ou elle passe quotidiennement les cartes-éclairs qui ont déjà été enseignées.
Le décodage
Le décodage est la capacité d’appliquer la connaissance des relations entre les lettres et les sons pour lire des mots correctement et couramment. Les élèves en immersion française doivent pouvoir décoder des mots français; cette habileté pouvant s’avérer très difficile pour des élèves qui ont un trouble d’apprentissage en lecture et la dyslexie. Une approche d’enseignement de la littératie qui est fondée sur des données probantes fournit des explications précises sur les stratégies de décodage et enseigne aux élèves à décomposer les mots en unités de son, ou phonèmes, puis à fusionner ces unités de son. Cette approche systématique permet aux élèves qui ont des troubles d’apprentissage de décoder plus facilement les mots en français. Les livres décodables se veulent une précieuse ressource dans un programme de phonétique francophone qui est fondé sur des données probantes. Contrairement aux livres de niveaux de difficulté progressifs qui sont souvent traduits de l’anglais, les livres décodables comportent des correspondances lettres-sons contrôlées et suivent une portée et une séquence de correspondances lettres-sons. Lorsqu’ils sont utilisés dans le cadre d’un programme de littératie global, les livres décodables permettent aux lecteurs débutants d’accéder à des textes en français, contrairement aux livres de niveaux de difficulté progressifs qui leur sont inaccessibles en raison de leurs correspondances lettres-sons complexes (p. ex., comme dans le mot “oiseau” ou “feuille”). Par ailleurs, les livres décodables sont conçus pour favoriser l’acquisition de bonnes habitudes de lecture (p. ex., regarder les mots), et pour encourager les élèves à chercher à décoder les mots qui ne leur sont pas familiers au lieu de deviner les mots inconnus en se fiant aux images, stratégie qui est rarement efficace pour les apprenants d’une langue seconde qui ne possèdent pas le vocabulaire requis pour deviner les mots qu’ils ne connaissent pas.
Le vocabulaire
Le vocabulaire, c’est la connaissance des mots et de leur signification. Cela comprend le vocabulaire expressif (les mots dits ou prononcés) et le vocabulaire réceptif (les mots entendus et compris). La connaissance du vocabulaire est essentielle pour les apprenants du français langue seconde, car elle favorise la compréhension, la communication, la lecture, l’écriture, la parole, l’écoute, la fluidité et la compréhension culturelle. Un vocabulaire riche améliore les compétences langagières globales et permet aux apprenants de s’engager plus efficacement à l’égard de leur langue seconde et de ses locuteurs. Le vocabulaire doit être explicitement enseigné aux élèves du français langue seconde parce que, contrairement à leurs pairs du programme anglais, ils ne possèdent pas un niveau de vocabulaire élémentaire à leur entrée à l’école; cette banque de mots doit donc leur être enseignée explicitement.
Il existe de nombreuses stratégies pédagogiques fondées sur des données probantes qui sont efficaces pour l’enseignement du vocabulaire aux apprenants d’une langue seconde. L’une des stratégies les plus efficaces pour aider les élèves qui ont des troubles d’apprentissage à apprendre de nouveaux mots et à s’en souvenir, consiste à leur demander d’associer les nouveaux mots de vocabulaire à des objets ou à des concepts qu’ils connaissent déjà ou à des mots semblables dans leur langue maternelle. Par exemple, les professionnels de l’enseignement peuvent attirer l’attention des élèves aux mots français dont la prononciation ou l’orthographe ressemblent à celles de mots anglais. On les appelle des mots apparentés. De nombreux mots anglais tirent leur origine du vieux français, et ce lien entre les mots de vocabulaire peut aider les élèves à améliorer leur vocabulaire en français (p. ex., musique et music; salade et salad; couleur et colour, etc.).
Les organisateurs graphiques constituent une deuxième stratégie efficace pour l’enseignement du vocabulaire aux élèves en français langue seconde qui ont des troubles d’apprentissage. Il s’agit de représentations visuelles qui montrent l’organisation de concepts et/ou de mots de vocabulaire. Ces organisateurs sont efficaces lorsqu’ils sont jumelés à de l’enseignement direct. Comme ils renferment des images visuelles, les organisateurs graphiques sont particulièrement appropriés pour les élèves en français langue seconde qui ont des difficultés en lecture. Les arbres de vocabulaire, les schémas conceptuels et les tableaux relationnels sont des exemples d’organisateurs graphiques. Lorsque les élèves ont terminé de lire, les enseignants peuvent utiliser des jeux de mots pour consolider la compréhension de nouveaux mots et susciter l’enthousiasme des apprenants de ces nouveaux mots.
L’orthographe
L’orthographe est une composante essentielle d’une approche globale de l’enseignement de la littératie en français fondée sur des données probantes. Pour bien épeler, les élèves doivent apprendre les règles et les régularités de l’orthographe, et les professionnels de l’enseignement du français doivent également connaître ces règles et régularités pour enseigner l’orthographe. L’enseignement de l’orthographe aide les élèves qui ont des troubles d’apprentissage, de même que tous les autres élèves, en expliquant clairement les règles et régularités de l’orthographe en français. Les élèves peuvent ainsi apprendre à mieux épeler en français et améliorer leurs habiletés générales en écriture. De plus, la connaissance des régularités en orthographe et la maîtrise de l’orthographe aident les élèves à décoder et à reconnaître plus facilement les mots.
Le recours à une approche multisensorielle comme l’approche Orton-Gillingham (Simultaneous Oral Spelling ou S.O.S. en anglais) constitue l’une des stratégies les plus efficaces pour enseigner l’orthographe aux élèves qui ont des troubles d’apprentissage dans une classe d’immersion en français. Cette stratégie améliore la conscience phonologique des élèves en leur permettant de décomposer les sons pour qu’ils s’exercent à épeler certains mots. Cette approche s’adresse initialement aux élèves qui apprennent à épeler des mots anglais, mais elle est tout aussi efficace pour les élèves qui ont des difficultés d’apprentissage en français langue seconde.
En classe, l’enseignant prononce un mot clairement (p. ex. « sac ») tout en montrant aux élèves la position de sa bouche, de ses dents, de ses lèvres et de sa langue lorsqu’il ou elle articule ce mot. Les élèves répètent ce mot. Ensuite, l’enseignant ou l’enseignante montre aux élèves comment séparer chaque phonème du mot, en comptant sur ses doigts ou en déplaçant une boule sur un boulier ou un cube alors qu’il ou elle prononce chaque son (p. ex. s… a… c). Puis, les élèves répètent les phonèmes des mots en levant un doigt ou en déplaçant une boule ou un cube pour chaque phonème prononcé. Ensuite, l’enseignant nomme la lettre correspondant à chacun des sons prononcés (p. ex. « S »… « A »… « C »...). Les élèves répètent les noms des lettres. Enfin, l’enseignant ou l’enseignante écrit chaque lettre au tableau blanc en prenant soin de bien former la lettre de haut en bas et de gauche à droite. Les élèves font de même. La leçon se termine une fois que les élèves ont lu le mot et en ont vérifié la signification.
Cette routine devrait se poursuivre à tous les jours, jusqu’à ce que les élèves soient tous capables d’isoler les sons et de les associer indépendamment à la bonne lettre (mise en correspondance des sons et des lettres). Pour pouvoir maîtriser l’orthographe, les élèves qui ont des troubles d’apprentissage auront besoin d’un soutien plus intensif lors de cet enseignement explicite et systématique de l’orthographe ainsi que d’un plus grand nombre de répétitions. Cet enseignement peut se faire en petits groupes de trois à cinq élèves pendant que les autres élèves travaillent de façon autonome.
La conclusion
En conclusion, l’adoption d’une approche globale de l’enseignement de la lecture et de l’écriture en français, fondée sur des données probantes, permet de soutenir les élèves qui ont des troubles d’apprentissage en leur expliquant clairement et systématiquement les habiletés de base de la lecture et de l’écriture. En mettant l’accent sur la conscience phonologique, la phonétique, le décodage, le vocabulaire et l’orthographe, cette approche fournit aux élèves les outils dont ils ont besoin pour apprendre à maîtriser la lecture et l’écriture en français, en dépit de leurs difficultés d’apprentissage.
Références
Cown, Carolyn. (2016). https://dyslexiaida.org/what-is-structured-literacy/
Including Students with Special Education Needs in French as a Second Language Programs, A Guide for Ontario Schools. (2015). https://files.ontario.ca/edu-1_3/edu-including-students-special-needs-fsl-en-2021-11-18.pdf
International Dyslexia Association of Ontario. (2021). https://www.idaontario.com/effective-reading-instruction/
Haber, R. N. (1970). Perception and memory for pictures: Single-trial learning of 2500 visual stimuli. Psychonomic Science, 19(2), 73–74. https://doi.org/10.3758/BF03337426
HD early child care research network. (2000). The relation of child care to cognitive and language development. Child Development, 71, 960-980.
Hostetter, A. B. (2011). When do gestures communicate? A meta-analysis. Psychological Bulletin, 137(2), 297–315. https://doi.org/10.1037/a0022128
Moats, Louisa Cook. (2020). Teaching reading is rocket science : What expert teachers of reading should know and be able to do. Washington, DC :American Federation of Teachers.
Kim Lockhart est enseignante en immersion française dans une école publique de Kingston (Ontario). Elle enseigne la littératie au cycle préparatoire et intervient en orthopédagogie de la lecture en français avec les élèves de la 1re à la 6e année. Elle est titulaire d’une maîtrise en éducation (M.Ed) de l’université Queen’s. En outre, elle a adopté une approche d’enseignement de la lecture et de l’écriture fondée sur des données probantes dans le cadre de son programme d’immersion française. Au cours de la dernière année scolaire, elle a contribué à l’enrichissement du contenu publié par une équipe d’experts en lecture en vue d’harmoniser le nouveau curriculum de littératie du ministère de l’Ontario avec les recommandations de la Commission ontarienne des droits de la personne publiées dans le document intitulé « Le droit de lire ». Mme Lockhart est une membre active du conseil d’administration de l’International Dyslexia Association of Ontario et formatrice en littératie dans le cadre du cours « Introduction to Structured Literacy ». Elle organise fréquemment des webinaires à l’intention des parents, des parents-substituts et des professionnels de l’enseignement partout au Canada.
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