Home Math Le bloc équilibré en mathématiques : Une clé pour soutenir les élèves ayant un trouble d’apprentissage

Le bloc équilibré en mathématiques : Une clé pour soutenir les élèves ayant un trouble d’apprentissage

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Par Michelle Poirier-Patry -Experte conseil en mathématiques et Stéphanie Charron, directrice responsable de la numératie au CCJL

Les incontournables en mathématiques pour les élèves ayant un trouble d’apprentissage.

Un bloc d’enseignement des mathématiques équilibré est essentiel pour aider les élèves, en particulier ceux ayant un trouble d’apprentissage (TA), à mieux comprendre les concepts et à devenir plus flexibles et efficaces dans leurs stratégies. L’objectif est de développer chez l’élève une compréhension du sens du nombre, ainsi que des compétences d’autonomie, d’auto-régulation et une mentalité de croissance.

Les élèves ayant un TA ont souvent des difficultés à mémoriser les faits numériques ou à traiter l’information rapidement. Travailler le sens du nombre les aide à comprendre ce qu’ils font, plutôt que de simplement appliquer des règles par cœur. Avec des stratégies claires et efficaces, ils apprennent à choisir la méthode la plus adaptée à chaque situation.

Un bloc équilibré comprend quatre éléments clés : les jasettes mathématiques, l’enseignement explicite des concepts, la pratique délibérée et la résolution de problèmes. Ces composantes permettent aux élèves de travailler leur sens du nombre, leur flexibilité et leur efficacité, en les rendant plus autonomes et confiants.

1ʳᵉ composante : la jasette mathématique

Qu’est-ce qu’une jasette ?

Une jasette mathématique est une courte routine visant à réactiver les connaissances, tout en préparant le terrain pour les prochaines notions. Elles mettent l’accent sur le raisonnement et le sens du nombre afin de développer une flexibilité mathématique.  La jasette peut prendre une multitude de formes par exemple, de la résolution d’une série d’équations en se servant d’une stratégie ciblée, de décrire une configuration de points ou encore de l’observation de régularités dans une photo.

Pourquoi utiliser cette pratique pédagogique ?

Cette activité, rapide et stimulante, capte l’engagement des élèves dès le début. Elle favorise la compréhension et le partage d’idées, en plaçant l’élève au centre des échanges : ce dernier parle davantage que l’enseignant. Elle permet également d’instaurer un climat propice aux apprentissages et donne le ton pour la suite du cours.  Cette pratique développe la confiance chez les élèves.

Comment faire la mise en œuvre de la pratique ?

Les élèves sont rassemblés près de l’enseignant et du tableau, créant un cadre propice à l’échange.

L’enseignant prépare intentionnellement sa jasette, parfois en l’insérant dans une séquence, afin de mettre en lumière une stratégie particulière.

Conçue pour être accessible à tous, la jasette invite les élèves à réfléchir, à discuter entre eux et à partager leurs idées.   Les erreurs y sont non seulement acceptées, mais valorisées comme faisant partie intégrante du processus d’apprentissage.

La composante en action

2ᵉ composante : L’enseignement explicite

Qu’est-ce que l’enseignement explicite ?

L’enseignement explicite est une forme concise et intentionnelle d’enseignement, pour vérifier la compréhension d’un nouveau concept, pour résumer l’expérience et pour fournir une rétroaction.

Les activités sont brèves et précises et comprennent un questionnement aux élèves. L’enseignant relie les idées, les habiletés et les concepts développés au cours de la leçon.

L’enseignement explicite peut impliquer tout le groupe-classe, de petits groupes flexibles ou une ou un élève à la fois.

Pourquoi utiliser cette pratique pédagogique ?

Les élèves ayant des troubles d’apprentissage peuvent avoir de la difficulté à gérer plusieurs informations en même temps. Ils ont souvent besoin qu’on décompose les tâches complexes en étapes simples.

La pratique permet de préciser et d’approfondir la pensée mathématique tout en réduisant la charge cognitive. Elle guide leur attention vers l’essentiel, en réduisant les distractions ou les étapes implicites.

La structure est claire et prévisible : modélisation → pratique guidée → pratique autonome.

Comment faire la mise en œuvre de la pratique ?

Les élèves sont placés autour d’une table près de l’enseignant, avec du matériel de manipulation mathématique.

L’enseignant verbalise ses réflexions en utilisant le vocabulaire mathématique, tout en présentant des modèles ou du matériel mathématiques et des représentations contextualisées.

Les élèves pratiquent la stratégie et l’enseignant guide les élèves par un questionnement et donne des rétroactions immédiates.

La composante en action

3ᵉ composante : la pratique délibérée

Qu’est-ce qu’une pratique délibérée ?

La pratique délibérée est une étape importante après la compréhension d’une nouvelle notion. Elle permet aux élèves de s’exercer avec l’aide de l’enseignant. Cette pratique peut prendre différentes formes : travailler seul, avec un partenaire, en petit groupe ou sous forme de jeux.

L’enseignant accompagne les élèves, pose des questions pour les faire réfléchir et leur donne une rétroaction immédiate pour les aider à progresser. C’est un moment où les élèves consolident leurs apprentissages et commencent à automatiser certaines connaissances ou stratégies.

Pourquoi utiliser cette pratique pédagogique ?

Cette pratique aide les élèves à mieux comprendre et à se sentir plus en confiance. Elle est utile pour tous, mais surtout pour ceux qui ont besoin de plus de temps ou de répétition, comme les élèves ayant un trouble d’apprentissage.

Avec un accompagnement adapté, les élèves avancent à leur rythme, font des réussites et développent leur estime de soi. Ils sont aussi plus motivés et moins anxieux. La pratique délibérée permet aussi à l’enseignant de s’adapter aux besoins de chacun.

Comment faire la mise en œuvre de la pratique ?

L’enseignant choisit des activités en lien avec ce qui a été appris, en tenant compte des besoins des élèves. Il peut organiser des stations où les élèves font des exercices seuls, à deux ou en groupe. Il peut aussi prendre du temps pour revoir certains points avec un ou quelques élèves.

Les jeux et les activités variées rendent la pratique plus intéressante.

Pendant que les élèves travaillent, l’enseignant pose des questions, écoute, corrige et encourage. Ce moment permet de bien ancrer les apprentissages tout en gardant un climat positif et motivant.

4e composante: résolution de problèmes

Qu’est-ce que la résolution de problèmes?

La résolution de problèmes est une des pratiques pédagogiques les plus efficaces pour consolider la compréhension des concepts mathématiques.

Pourquoi faire de la résolution de problèmes?

Développer des stratégies cognitives

Les élèves peuvent avoir du mal à organiser leur pensée ou à planifier leurs actions.
En pratiquant à faire des résolutions de problèmes ils sont amenés à structurer leur raisonnement, à analyser une situation, à choisir une stratégie et vérifier leur réponse.

Renforcer la compréhension des concepts

Les élèves avec des troubles d’apprentissage peuvent avoir de la difficulté à transférer une connaissance d’un contexte à un autre. La variété des problèmes permet de pratiquer l’adaptation des stratégies à différents types de situations. Aussi, les mathématiques peuvent sembler abstraites. Les problèmes les placent dans un contexte concret, ce qui aide à comprendre pourquoi on apprend une notion.

Résoudre un problème oblige à mobiliser différentes connaissances.
Cela favorise une compréhension plus profonde et durable, car les élèves sont amenés à faire des liens entre les concepts.

Encourager le travail collaboratif

La résolution de problèmes en petites équipes permet aux élèves d’échanger des idées, d’entendre différentes stratégies et de construire ensemble des solutions.
Cela aide ces élèves à apprendre par les pairs.

Valoriser les forces différentes

Un élève ayant un trouble d’apprentissage peut surprendre dans la résolution d’un problème par une approche originale, une intuition forte ou une bonne logique.
Ces situations permettent de reconnaître et valoriser des formes d’intelligence qui ne ressortent pas toujours dans la pratique délibérée.

Favoriser la persévérance et l’autonomie

Les problèmes posent souvent des défis. Les aborder avec soutien (en aidant les élèves à faire des schémas, à organiser leurs stratégies, à les questionner, à leur donner de la rétroaction) aide les élèves à développer leur autonomie, leur confiance, et à apprendre que l’erreur fait partie du processus.

Comment faire la mise en œuvre de la pratique?

« Les problèmes proposés devraient partir de contextes réels (des situations qui surviennent en classe), de contextes réalistes (des situations provenant d’expériences vécues par les élèves à l’extérieur de la salle de classe) et même de contextes fantaisistes (des situations qui font appel à l’imaginaire des élèves) » (Vézina et coll., 2006, p. 4). Le contexte leur donne une raison de « faire des mathématiques ».

Le problème est présenté à l’oral puisque l’on enlève la problématique en lecture, bien qu’il y a un appui visuel du problème. Les mots de vocabulaire sont expliqués au besoin.

Ensuite on relie le problème et le visualise. On peut même fermer les yeux ou mimer le problème.

On leur demande de ressortir ce qu’ils remarquent, ce qu’ils connaissent et ce que l’on cherche à savoir.

Les élèves vont ensuite faire un schéma du problème et une équation pour le représenter. Le schéma peut être sous forme d’un simple croquis ou en utilisant un modèle à barres de la méthode Singapore.

L’enseignant décide des regroupements d’élèves selon son intention et des endroits à travailler (debout au mur, à une table ou avec l’enseignant). Le matériel de mathématiques est à la portée des élèves.

Ensuite les élèves utilisent leurs référentiels pour décider de la stratégie qu’ils aimeraient utiliser pour résoudre le problème et en font l’exécution à l’aide du matériel.

L’enseignant peut accompagner une équipe pour bien les démarrer ensuite circuler en questionnant et en donnant de la rétroaction aux élèves.

Une consolidation se fait à la fin selon une intention précise: pour faire ressortir la flexibilité et l’efficacité des stratégies utilisées et pour faire des précisions (p.ex., l’efficacité des traces) ou des liens entre les concepts. Ce n’est pas de longue durée. Il est préférable de traiter d’une intention par consolidation.

La composante en action

Conclusion

Il est important d’équiper les élèves avec des stratégies qu’ils comprennent réellement. Lorsqu’ils saisissent le sens de ce qu’ils font, leur confiance grandit, et ils deviennent fiers de pouvoir choisir et appliquer une procédure par eux-mêmes.

En travaillant avec rigueur les composantes essentielles et les incontournables pédagogiques, l’apprentissage devient possible, durable et significatif.

Offrons-leur plus d’une stratégie tout en nous assurant de leur compréhension. Car c’est la compréhension qui permet la réussite, bien plus que la mémorisation de procédures.

Références bibliographiques

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  2. CFORP and Ontario, En avant les maths, Capsules vidéos – Conversations mathématiques. n.d. Web. https://enavantlesmaths.e-a-v.ca/pafi/pratique/conversations-mathematiques/
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  6. CFORP and Ontario, En avant les maths, Vidéos de l’enseignement explicite. n.d. Web. https://enavantlesmaths.e-a-v.ca/pafi/pratique/enseignement-explicite/
  7. CCJL, La Stratégie de Soustraction, Référentiel de l’enseignement explicite pour l’élève. n.d. Web. https://docs.google.com/presentation/d/1HYKIELxHk8M-2-JA1No-BTxQ8yfIQpYAwGUR-tgSGsE/edit?slide=id.g31b26a0765a_0_115
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  9. Édusource Ontario, L’importance de l’enseignement explicite dans nos écoles. n.d. Web. https://edusourceontario.com/res/lot18-AEI-maitres-chercheurs-education-07
  10. Édusource Ontario, L’enseignement explicite en mathématiques basé sur la résolution de problèmes. n.d. Web. https://edusourceontario.com/res/video-math-tlx-21
  11. CFORP and Ontario, En avant les maths. Capsule vidéo – La pratique délibérée. n.d. Web. https://enavantlesmaths.e-a-v.ca/pafi/pratique/pratique-deliberee/
  12. CFORP, La pratique délibérée au cycle primaire – Document d’appui. n.d. Web. https://cdn.cforp.io/cdn/ealm24/Doc%20Appui%20Primaire%20v6_A_V.pdf
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Œuvrant depuis 43 ans en éducation, Michelle est devenue passionnée de l’apprentissage des mathématiques pour tout type d’apprenant lorsqu’elle enseignait de la M-6e année.

Toujours à la recherche d’approches pédagogiques pouvant faire comprendre les mathématiques à ses élèves, elle a eu le privilège de travailler à la rédaction des Guides d’enseignement efficace des mathématiques de 2005 à 2008.

Depuis ce temps, son parcours l’a mené vers des rôles de conseillère pédagogique en mathématiques au CEPEO pendant 7 ans, d’agente du rendement au Ministère de l’éducation, de consultante et réviseure pédagogique pour des maisons d’édition et de vice-présidente de l’AFEMO (Association francophone des mathématiques de l’Ontario).

Maintenant à la semi-retraite depuis 10 ans, Michelle poursuit sa passion en partageant cet amour de l’apprentissage des maths avec plusieurs adultes et élèves, dont ceux du CCJL.

Stéphanie est une professionnelle de l’éducation passionnée par l’innovation pédagogique et les stratégies d’enseignement des mathématiques, un domaine dans lequel elle œuvre avec enthousiasme depuis plus de 27 ans. Actuellement directrice responsable de la numératie au Consortium Centre Jules-Léger, elle a accumulé une riche expérience en occupant divers postes, dont celui de conseillère pédagogique en numératie au CEPEO pendant sept ans et enseignante lead en numératie.

En parallèle de ses responsabilités au sein du Consortium, Stéphanie agit comme consultante pour le développement et la révision de ressources pédagogiques en mathématiques au Centre de leadership et d’évaluation (CLÉ). Son expertise a également été sollicitée dans plusieurs projets de collaboration, notamment avec le Centre Franco et l’Ontario Association for Mathematics Education (OAME).

Depuis 2022, elle est membre active du conseil d’administration de l’Association francophone pour l’enseignement des mathématiques en Ontario (AFEMO), un rôle qui lui permet de contribuer davantage à l’essor de la pédagogie des mathématiques en milieu francophone.

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