Loading Ajouter aux Favoris

Par Nathalie Arbour, Orthopédagogue au Service d’aide à l’apprentissage de Lanaudière et conseillère en services adaptés au collège de Saint-Jérôme

Qu’est-ce que la métacognition ?

La métacognition est un processus relié aux connaissances que l’on possède au sujet de nos propres stratégies et au contrôle que l’on exerce sur celles-ci afin de nous aider à résoudre un problème de façon plus efficace. Cette fonction exécutive de haut niveau qui fait appel à la capacité de réfléchir sur ses connaissances à comprendre son propre fonctionnement et à évaluer sa démarche lors des apprentissages est d’ailleurs un des meilleurs prédicateurs de la réussite scolaire (Dévolvé, 2005).

Lorsqu’on doit apprendre de nouveaux concepts, résoudre des problèmes, faire des liens ou bien créer des relations entre des idées et des concepts, il existe une sorte de discours intérieur que l’élève entretient de façon inconsciente avec lui-même. À cette étape, ceci demande en cours d’exécution de la tâche d’exercer un contrôle sur lui-même et de réguler ses actions afin de réutiliser et d’ajuster ses stratégies de façon consciente dans ses apprentissages.

Or, nous savons que pour les élèves ayant des troubles d’apprentissage (TA) ce processus n’est pas effectué de façon consciente, il doit être enseigné, et ce, de façon explicite. Malheureusement, cette habileté de discours intérieur est souvent oubliée, malgré qu’elle s’avère très riche et utile en situation d’apprentissage.

Les aides technologiques et le développement de la métacognition

Pour nos élèves qui utilisent les fonctions d’aide technologiques, cette habileté doit être développée et exploitée, car l’utilisateur doit devenir autonome et efficace dans l’accomplissement des tâches afin de démontrer son plein potentiel. Ces fonctions d’aide technologiques permettent le développement de la métacognition, car elles incitent à la réflexion en offrant un reflet du travail accompli.

Par exemple, lorsque la rétroaction vocale par synthèse vocale et le prédicteur orthographique sont utilisés dans le but de travailler la syntaxe des phrases, l’élève doit apprendre à s’arrêter dès le moment où il entend quelque chose d’inadéquat ou qu’une proposition lui est offerte. Il doit alors se questionner sur les différences entre ce qu’il vient d’entendre, ce qu’il voit parmi les choix présentés en fonction de ce qu’il a vraiment voulu mentionner. Au besoin, il devra se réajuster en faisant appel aux stratégies qu’il connait dans le but d’améliorer sa phrase.

Dans cet exemple, l’élève doit faire une prise de conscience de façon délibérée sur ce qu’il connait, comment il doit procéder et ce qu’il utilisera pour résoudre la situation. Notons que la métacognition n’est pas un processus linéaire. Une séquence ordonnée peut être suivie tout en effectuant des retours à l’arrière au besoin afin de se réajuster.
Image du document

Cliquer ici afin d’accéder à l’affiche imprimable Quand j’utilise la rétroaction vocale.

L’enseignement explicite de la métacognition

Pour être efficace, un discours intérieur doit être développé. Évidemment, au départ, les élèves moins habiles ne prendront pas automatiquement conscience de la présence de cette stratégie. Rappelons-le, celle-ci peut s’effectuer de façon naturelle chez certains élèves, mais n’est pas nécessairement utilisée par tous. Par conséquent, il est primordial de développer cette prise de conscience pour devenir un apprenant actif avec les fonctions d’aide technologiques.

L’enseignement explicite devient alors un atout à privilégier. Dans un premier temps, en individuel, la personne responsable peut servir de modèle en verbalisant, à voix haute, ses pensées. Par une séance d’entrainement guidée qui offre des rétroactions et des corrections dans l’immédiat, l’utilisateur n’a qu’à reproduire ce qu’il voit ou entend. L’important c’est que celui-ci soit en action pour mieux intégrer ce qui lui est démontré.

Dans un deuxième temps, le professionnel de l’enseignement peut effectuer la même démarche devant la classe afin de stimuler l’utilisation du langage intérieur. Cette habileté peut être également développée en tirant profit des différences chez les élèves. En exploitant leurs forces, on leur demande de verbaliser leurs pensées à voix haute. Cette pratique permettra autant aux élèves ayant des TA que ceux sans TA l’accès à cette habileté.

Démonstration de la métacognition avec les fonctions d’aides technologiques

Prédiction de mots

Dans l’exemple suivant : « Durant le vol, j’ai dormi sur l’avion »

Lorsque j’entends cette phrase, je sens que la formulation pragmatique n’est pas adéquate. Je peux alors reculer mon curseur dans chacun des mots et vérifier les propositions émises par la boite de prédiction. Je m’aperçois donc qu’après le mot « dormi » on me propose le mot « dans » au choix numéro 1.

Je vérifie chacun des mots afin de m’assurer qu’ils ont tous leur place dans la phrase.

Je me questionne sur la façon dont je pourrais formuler ma phrase autrement pour qu’elle soit plus claire. À cet effet, si un temps d’arrêt est utilisé, on remarque lorsque le curseur est placé à l’endroit où il semble y avoir erreur, la boite de prédiction propose en premier choix la préposition « dans » qui est le choix le plus probable dans ce contexte. Il est important à cette étape de s’arrêter et de se questionner.

À l’aide de ma liste de prépositions travaillées en classe et en utilisant la boite de prédiction, je m’aperçois que la préposition « dans » est plus appropriée que « sur », puisqu’on ne dort pas sur un avion, mais bel et bien dans un avion.

Image du document

Cliquer ici afin d’accéder à l’affiche imprimable Quand j’utilise la prédiction de mots.

Révision/correction

Certaines fonctions d’aide peuvent offrir des alertes visuelles, ce qui est le cas de la fonction d’aide révision/correction incluse dans des produits tels que Word, Antidote, Le Robert correcteur, Médialexie, etc.
Fonction d'aide révision/correction

Toutefois, l’élève doit prendre le temps à chaque erreur soulignée de réfléchir aux propositions émises et faire référence aux stratégies de grammaire vues en classe dans le but de faire adéquatement ses choix. Notons que celles-ci doivent être considérées comme des erreurs potentielles, puisque seul l’utilisateur a la possibilité d’exercer son jugement.

Image du document

Cliquer ici afin d’accéder à l’affiche imprimable Quand j’utilise la révision/correction.

Stratégies pour prendre conscience et développer le langage intérieur

Afin de développer cette habileté, il existe plus d’une façon de travailler. Pour stimuler et développer le discours interne de manière consciente, il faut d’abord apprendre à se connaitre et comprendre comment on apprend.

Voici quelques moyens pouvant être utilisés par le professionnel de l’enseignement afin de favoriser le développement de la métacognition.

Lors de l’enseignement explicite, encourager les élèves à écouter leur voix intérieure et à partager oralement ce qu’ils pensent.  Il pourrait être intéressant de colliger les meilleures « pensées » et de les rendre disponibles à la vue de tous afin d’alimenter les élèves dont le discours intérieur est plus faible.  Le professionnel de l’enseignement pourra, par la suite, inciter des élèves à les consulter.

Lors d’un travail à effectuer, tenir un journal de ses propres pensées et des stratégies utilisées permet également de prendre conscience de notre discours intérieur. Par la suite, un partage en groupe dans le but de déterminer lesquelles se sont avérées les plus efficaces permettra de confronter les étapes et méthodes pour effectuer un même travail.

Un autre moyen efficace est de placer les élèves en dyade lors d’un travail à effectuer. Ceci suscite le questionnement et remet en doute les procédures utilisées dans une même tâche. De plus, cette méthode permet la prise de conscience et l’échange dans l’immédiat, sur les étapes à suivre pour résoudre un problème.

D’ailleurs, l’apprentissage par les pairs est un moyen efficace. Pour cette partie, il est souhaitable de placer un élève à l’aise à verbaliser ce qui se passe dans sa tête avec un élève moins à l’aise afin que celui-ci serve de modèle.

Voici quelques exemples de questionnements qui peuvent être utilisés.

  • Quand je m’y prends de cette façon pour résoudre un problème, je place en ordre par écrit ce que j’ai fait afin de me souvenir de chacune des étapes.
  • Je crois que c’est à cet endroit que je me suis trompé.
  • Je devrais utiliser plutôt telle stratégie (nommer la stratégie connue) pour me réajuster.
  • En procédant de cette manière, cela me permettrait de résoudre le problème de façon plus efficace.

Pour d’autres exemples de questions, cliquer ici afin d’accéder à l’article Je réfléchis à ce que je fais : stratégies pour développer ses compétences métacognitives.

Pédagogie inclusive et métacognition

Certaines fonctions des aides technologiques peuvent très bien être utilisées dans le but d’enseigner des notions pour tous les élèves qu’ils aient des TA ou non. Dans un contexte de classe, on observe souvent que, lorsque les technologies sont incluses dans la pratique quotidienne à l’intérieur d’activités dirigées, elles ont pour effet d’augmenter la motivation chez tous les élèves.

Par exemple, si je dois travailler le concept d’adjectifs avec mes élèves, je pourrais utiliser la fonction d’aide Révision/Analyse linguistique qui a pour but de sélectionner un filtre pertinent dans Antidote. Cet outil aura pour but de cibler, à l’aide d’une surbrillance, les adjectifs présents dans un texte. L’exemple ci-dessous en fait la démonstration. À l’aide du filtre Statistique/Catégorie, les adjectifs sont mis en évidence, par la couleur jaune, ce qui incite les élèves à porter leur attention et travailler seulement sur cette notion.

 

Image du logiciel antidote

Image du logiciel antidote

 

Une telle activité est propice au modelage d’habiletés métacognitives. Par la suite, un travail individuel doit être prévu afin de réinvestir les nouvelles connaissances.

Pour nos jeunes ayant des TA et qui utilisent les fonctions d’aide, la tâche pourra être effectuée selon les pratiques guidées vues en classe. De cette façon et en s’exerçant de façon quotidienne, les utilisateurs deviendront plus autonomes avec leurs outils.

Quant aux autres élèves, ils pourront recourir à la métacognition dans une tâche papier/crayon ou à l’ordinateur, si ce moyen est prévu comme flexibilité pédagogique. Quel que soit le choix du matériel utilisé, cette stratégie pourra être employée, car elle devient aussi un atout utile à tous !

Ressources pertinentes sur le site Web de TA@l’école

Cliquer ici afin d’accéder à l’enregistrement du webinaire Les aides technologiques : des outils utiles pour des fins pédagogiques favorisant l’apprentissage de tous.

Cliquer ici afin d’accéder à l’article Comment les technologies peuvent aider les élèves ayant des troubles d’apprentissage en lecture et en écriture?.

Cliquer ici afin d’accéder à la vidéo Stratégies et interventions pour soutenir le développement des fonctions exécutives.

Cliquer ici afin d’accéder à l’article TDAH et fonctions d’aide technologiques.

Cliquer ici afin d’accéder à l’article Je réfléchis à ce que je fais : stratégies pour développer ses compétences métacognitives.

Ouvrages de référence

Dévolvé, N. (2005). Tous les élèves peuvent apprendre : Aspects psychologiques et ergonomiques des apprentissages scolaires. Ed. Hachette Éducation.